CHRONIQUE DE BÂTIMENT DURABLE QUÉBEC
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- Claude-Alain Roulet (2004)
Au cœur de la tourmente, dans l’ère actuelle caractérisée par l’urgence d’agir face au réchauffement planétaire et à l’épuisement graduel des ressources naturelles qui nous sont vitales, l’efficacité énergétique n’est désormais plus une option, mais bien une obligation.
Pour espérer atteindre un niveau d’efficacité énergétique qui permettra (peut-être) de renverser la lourde tendance des changements climatiques, il importe, en tant que société, de se donner les moyens d’allier production et utilisation d’énergie renouvelable en plus d’aborder les projets de construction, petits et grands, sous l’angle de la sobriété. Tôt ou tard, cette dernière devra se traduire dans notre manière d’imaginer nos villes et nos bâtiments.
À l’échelle du bâtiment, cette quête de sobriété forcera les concepteurs à tirer le meilleur parti des conditions naturelles des sites et du climat local. Elle nous mènera, espérons-le, à une architecture naturellement confortable. Cependant, pour y parvenir, il faudra ni plus ni moins retourner aux sources et s’efforcer de créer une architecture dite bioclimatique.
Passif avant tout
Comme l’affirme Claude-Alain Roulet dans son ouvrage Santé et qualité de l’environnement intérieur dans les bâtiments[1], un bâtiment bien conçu devrait pouvoir assurer, sans aucune compensation d’énergie, un confort au moins équivalant à celui régnant à l’extérieur. Ainsi, l’intérieur d’un bâtiment ne devrait être en aucun cas plus chaud en été ou plus froid en hiver que les conditions observées à l’extérieur. Pour ce faire, une combinaison équilibrée de stratégies passives et actives s’impose.
Rappelons que les mesures architecturales et constructives passives permettent d’atteindre naturellement un niveau de confort au sein d’un bâtiment, et ce, sans ou avec très peu d’apports d’énergie grâce à la ventilation naturelle, le solaire thermique, l’éclairage naturel, etc. Quant aux mesures actives, elles reposent sur des actions mécaniques consommant de l’énergie, dont le chauffage électrique, la ventilation mécanique, etc.
En conception, particulièrement dans le cas d’un projet de nouvelle construction, travailler d’entrée de jeu à l’intégration de systèmes actifs, aussi simples et performants soient-ils, ne constitue pas une approche durable. En fait, ces mesures dites technologiques ne devraient être utilisées que pour compenser pour les défauts des bâtiments, soit principalement leur incapacité à contrer la surchauffe en période estivale et leur difficulté à limiter les pertes thermiques en saison froide. Lorsque bien orientés, dimensionnés et calibrés, les systèmes d’un bâtiment conçus en accord avec les bonnes pratiques bioclimatiques permettront de limiter le recours aux stratégies actives et, par le fait même, de minimiser la consommation énergétique. D’autre part, une approche low-tech limitera les risques de bris et de pannes de systèmes.
Réduire à la source
Entre 1990 et 2012 au Québec, tel que mentionné dans le rapport État de l’énergie au Québec 2016[2], le nombre de logements occupés par 1 000 habitants est passé de 366 à 420. Au cours de la même période, la taille moyenne des logements a pour sa part augmenté de 17 %. En termes de sobriété, il est sans conteste possible de faire mieux.
Il s’avère donc urgent de procéder à un examen de conscience, à la fois sur une base individuelle et collective. Avons-nous réellement besoin de tout ce que nous tenons pour acquis, de tout ce que nous réclamons ?
[1] Roulet, C.A. (2004) Santé et qualité de l’environnement intérieur dans les bâtiments. Presses Polytechniques Romandes, 358 p.
[2] Whitmore, J. et Pineau, P.-O. (2015) État de l’énergie au Québec 2016, Chaire de gestion du secteur de l’énergie, HEC Montréal, décembre 2015 [version électronique]. Récupéré du site: energie.hec.ca
Par François Cantin, M. Sc. Arch.
L’auteur est chargé de projets chez Coarchitecture, spécialiste des stratégies d’occupation et du confort de l’occupant au sein des environnements de travail, formateur pour le Centre de formation en développement durable de l’Université Laval ainsi que bénévole pour la section de Québec du CBDCa.