Le Complexe de soccer intérieur du parc Chauveau, à Québec, un bâtiment durable érigé à partir d’une ossature de bois 100 % québécoise.
Dans le secteur Neufchâtel de la ville de Québec, l’entrée du parc Chauveau, qui passait jadis inaperçue, est maintenant marquée par la présence d’un stade de soccer au dôme blanc. En façade sud-est, des volumes vert lime sont placés en saillie, de part et d’autre d’une fenestration abondante. À travers celle-ci, d’immenses arches de bois, 100 % québécois, attirent le regard avec leurs 73 mètres de portée.
D’une superficie nette de 9 330 mètres carrés, le Complexe de soccer intérieur du parc Chauveau abrite une surface synthétique Fieldturf, notamment composée d’une couche de granules de caoutchouc dérivées de pneus recyclés. Selon le fabricant, chaque terrain contient environ 20 000 pneus recyclés. Conçu pour une clientèle variée, le terrain professionnel de 65 mètres par 100 mètres peut être divisé en trois terrains, eux aussi subdivisibles, pour un potentiel de neuf petits terrains récréatifs.
L’expérience de l’utilisateur est au cœur du concept architectural. Les locaux spécialisés sont regroupés le long de la façade : gradins pour 300 spectateurs, vestiaires, casse-croûte, bureaux, salles de réunion, billetterie, etc. La circulation entre les différentes aires de service est donc simple et rapide, mais surtout empreinte de lumière naturelle, une caractéristique plutôt rare pour une telle infrastructure.
« La Ville de Québec avait pour objectif de se doter d’un terrain de soccer intérieur, au sein d’un bâtiment exemplaire et avant-gardiste, relate Vadim Siegel, architecte associé chez ABCP Architecture. C’était un projet divisé en lots, avec devis de performance. Ainsi la conception fine se faisait au fur et à mesure que le projet avançait. Elle a débuté en 2007 et le projet a été livré en 2009. »
La plus grande particularité de ce bâtiment : son ossature de bois. Éric Boucher, ingénieur chez EMS, explique ce choix : « Avec les arches du stade Chauveau, le bois était le matériau de choix. Il se comporte bien dans une telle structure et, dans cette situation, il peut rivaliser du point de vue économique. »
Selon lui, ce n’est toutefois pas toujours le cas. « Il n’y a pas assez de compétition dans l’industrie du bois lamellé, dit-il, et les échéanciers ne sont pas toujours respectés. » Comme piste de solution, il suggère la conception d’ossatures hybrides, qui pourraient combiner le bois, au béton ou à l’acier.
La toiture à double courbure permet de minimiser la hauteur des murs extérieurs tout en réduisant la quantité de matériaux nécessaires en périphérie. Ainsi, au centre du terrain, la hauteur libre est de 19 mètres alors qu’aux lignes de jeux elle est de 7 mètres. Vadim Siegel fait remarquer que « les arches ont toutes le même rayon de courbure ; la hauteur de la fondation décroît vers les extrémités et donne la courbe longitudinale du toit ».
Dany Blackburn, architecte associé chez ABCP, était responsable de la certification LEED du Complexe de soccer. « Nous avons pris le volet qualité des environnements intérieurs (QEI) au sérieux, les camions n’entraient pas dans le stade sans connecter leur tuyau d’échappement pour l’évacuation des gaz. Le bâtiment a été purgé avant utilisation et j’ai demandé à ce que les poutres soient nettoyées pour enlever les poussières qui se sont déposées lors de l’installation d’une sous-couche de sable fin pour le terrain synthétique. »
Au cours du processus de certification, Dany Blackburn a présenté une demande d’interprétation de crédit (DIC) auprès du CBDCa pour l’indice de réflectance réel de la toiture sélectionnée : une membrane Soprema Soprastar HD, composée de bitume modifié, d’une armature composite et de granules hautement réfléchissantes. L’architecte et le manufacturier ont démontré que la membrane choisie répondait aux exigences LEED lorsqu’elle était installée sur une toiture courbe, et qu’il n’était pas nécessaire d’appliquer, sur toute la surface, une peinture réfléchissante pour augmenter son albédo. « Sur un toit plat, précise-t-il, la même membrane aurait dû être peinte. ».
Le moins de perturbation possible, voilà le mot d’ordre pour construire dans un parc. « On a conservé presque tous les arbres existants et aménagé un stationnement perméable », indique l’architecte. Un bassin de rétention, composée d’une rigole de surface en forme de serpentin, collecte toutes les eaux de pluie du stationnement de même que l’eau captée par les 465 mètres carrés de toiture. L’eau de pluie naturellement filtrée termine sa course dans le ruisseau Sainte-Barbe. « L’eau à la sortie du bassin est très claire », précise Dany Blackburn, qui a lui-même inspecté ce dernier.
Au niveau de l’éclairage, l’ingénieur Nicolas Chapados de Genivar, rappelle les contraintes d’un centre sportif : « Les faisceaux des lampes à halogénures métalliques doivent être installés de manière à minimiser les zones d’ombres et les contrastes. Nous avons fait une simulation numérique pour s’assurer que tout était beau, vu la dimension des arches. »
Pour la mécanique, la courbure du toit représentait un défi. « Il fallait, d’après Nicolas Chapados, que les conduits suivent la courbe pour ne pas masquer le bois, mais aussi pour ne pas compromettre la hauteur libre. En saison de chauffage, on doit faire redescendre la chaleur sur les occupants. Pour ce faire, il nous faut un bon brassage d’air. Le conduit d’air souple à induction a la propriété d’induire un mouvement d’air dans un grand volume. De plus, ce dernier résiste au choc d’un ballon. Par contre, il ne peut pas plier, ce qui a nécessité la fabrication de coudes sur mesure. » Pour compléter le chauffage des gradins et de l’aire de jeu, des plafonniers radiants au gaz naturel procurent de la chaleur par rayonnement infrarouge, ce qui permet de conserver une température ambiante un peu plus faible.
« En saison estivale, on a misé sur un système de conditionnement semi-naturel, sans refroidissement mécanique. Celui-ci amplifie le mouvement de l’air chaud qui monte, à l’aide de trois évacuateurs de 5 HP (3,73 kW) sur le toit, munis d’entraînements à fréquence variable. L’air de remplacement (45 000 CFM ou 21 m3/s) entre par six volets motorisés situés sur trois côtés du bâtiment. Le mouvement d’air créé à l’intérieur du stade contribue à accentuer le confort des occupants en période chaude.
Pour assurer le bon fonctionnement de tous ces systèmes, une mise en service améliorée a été effectuée. Et elle a porté fruit, rapporte Dany Blackburn : « La Ville a même rehaussé ses critères de mise en service à la suite de la démarche effectuée pour le stade Chauveau. »
Le Complexe de soccer Chauveau a obtenu la certification LEED-NC Argent le 30 octobre 2012. En 2011, il avait remporté le Prix d’excellence cecobois dans la catégorie Bâtiment institutionnel de plus de 600 m².
* Marie-Ève Sirois est cofondatrice d’Écobâtiment.
- Fenestration principale orientée sud-est alors qu’elle est absente du côté nord.
- Toiture blanche : IRS = 86.
- Isolation des murs extérieurs principaux : RSI 4,5
- Isolation du toit : RSI 3,8
- Fenestration : U = 2,11 W/m2K et SHGC (Solar Heat Gain Coefficient) = 0,34.
- Aménagement paysager économe en eau.
- 100 % des eaux pluviales sont captées et filtrées sur le site.
- Adhésifs et produits d'étanchéité à faible émission de COV.
- Peintures et enduits à faible émission de COV.
- Bois composite et adhésifs pour stratifiés à faible émission de COV.
- 2 chauffe-eau à condensation au gaz naturel (117 kW chacun) avec 1 réservoir tampon.
- Récupération de chaleur : roues thermiques (efficacité de 50 % environ) installées sur le système de ventilation de l’aire de jeu (30 000 CFM ou 14 m3/s), de même que sur le système 100 % d’air neuf qui alimentent les douches et vestiaires.
- Sondes de CO2 qui contrôlent l’apport d’air frais pour l’aire de jeu et les locaux administratifs.
- Tubes fluorescents de type T5 avec ballasts électroniques et détecteurs de présence.
- Aucun refroidissement mécanique pour l’aire de jeu et les gradins.
- Mise en service améliorée.
- Gestion des déchets de construction : détournements d’au moins 75 % des déchets du site d’enfouissement.
- Utilisation d’au moins 7,5 % de contenu recyclé dans les matériaux.
- Au moins 20 % de matériaux d'extraction et de fabrication régionale.
- Performance énergétique : 47 % sous le bâtiment de référence du CMNÉB.
- Éclairage efficace : la puissance d’éclairage moyenne pour le bâtiment proposé est de densité moyenne 9,67 W/m², comparativement à 12,35 W/m² pour la référence.
Client : Ville de Québec
Architecture : Consortium ABCP Architecture, Coarchitecture
Expertise LEED : ABCP
Génie électromécanique : Genivar
Génie civil et structural : Roche ltée Groupe-conseil et le Consortium Génio, EMS, Teknika HBA
Conception en structure : Nordic bois d’ingénierie (Chantiers Chibougamau)
Gérance de projet : Decarel
- Utilisation de 1 600 mètres cubes de bois pour l’ossature, ce qui a permis d’éviter l’émission de 1 760 tonnes de CO2
- Bois structural certifié FSC
- Coût des produits structuraux : 4 000 000 $
- 11 arches de bois lamellé-collé à 3 rotules :
- Fabrication régionale, à moins de 800 km de Québec, par Chantier Chibougamau
- Essence : Épinette noire d’Abitibi
- Poids : 32 000 kg chacune
- Dimension : 1,85 m X 0,3 m
- Portée : 73 m
- Hauteur libre : 19 m