Mener à bien une démarche de recommissioning, c’est engranger des économies d’énergie en continu. Des experts en efficacité énergétique et en exploitation immobilière en témoignent.
À l’heure de la transition énergétique au Québec, les gestionnaires immobiliers ont tout intérêt à recourir au recommissioning. En plus de pouvoir bénéficier de généreuses aides financières, ils peuvent recouvrer rapidement leur investissement et profiter d’économies durables sur leur facture énergétique tout en améliorant le confort des occupants.
Si le commissioning a bel et bien fait ses preuves dans le cas de l’optimisation opérationnelle des équipements mécaniques d’immeubles neufs ou ayant fait l’objet de rénovations majeures, il en va de même pour la remise au point des systèmes des bâtiments. Cette opération, soit le recommissioning, consiste en une révision complète des séquences de contrôle programmées en établissant un train de mesures d’efficacité énergétique menant à une optimisation globale de la performance du bâtiment.
La marche à suivre est relativement simple. Elle implique que l’agent de recommissioning fournisse au gestionnaire un plan détaillé de ses interventions – incluant un échéancier et une estimation des coûts –, un rapport d’investigation de l’état de la situation du bâtiment s’accompagnant d’un diagnostic, un rapport d’implantation des mesures recommandées et de transfert des connaissances (formation des opérateurs), ainsi que des rapports annuels de suivi des résultats sur au moins deux ans.
Démarche payante
Coordonnateur du Service d’accompagnement technique chez Transition énergétique Québec, Stéphan Gagnon est convaincu de la pertinence de cette démarche. Et il appuie ses avancées sur plusieurs études de cas faisant état d’économies d’énergie de l’ordre de 10 à 15 % en général, et pouvant même atteindre jusqu’à 30 % dans certains cas. « Le recommissioning, résume-t-il, est une façon peu coûteuse d’améliorer le confort d’un immeuble tout en réduisant les coûts d’exploitation. »
À la différence du commissioning, précise-t-il, le recommissioning est une démarche qui peut être entreprise cinq, dix ou quinze ans après une mise en service des équipements mécaniques. Cela peut s’avérer nécessaire, par exemple, lorsque l’occupation d’un bâtiment change ou que les séquences de contrôle ou le réglage des équipements nécessite des ajustements. Un expert en recommissioning évalue le bâtiment et les performances de ses équipements afin de déterminer des mesures pouvant les optimiser en fonction des nouvelles techniques disponibles et, surtout, en fonction de l’occupation et des usages actuels du bâtiment.
Selon l’ingénieur Stéphan Gagnon, une telle remise au point des systèmes mécaniques présente un potentiel d’économies d’énergie important dans tous les bâtiments existants, même ceux bien entretenus.
Exemples probants
L’édifice Caron construit en 1923 sur la rue De Bleury, au centre-ville de Montréal, en est un bon exemple. Le directeur général de Gold Castle Holdings, qui gère l’immeuble, David Gold, témoigne du succès d’une démarche de recommissioning entreprise en 2013.
Mandatée pour mener un projet de recommissioning, la firme Systèmes Énergie TST, a procédé à une évaluation approfondie de tous les paramètres d’opération programmés des systèmes électromécaniques en place afin de proposer diverses mesures pour en optimiser les performances. L’investissement global de la démarche s’est élevé à 150 000 dollars. Résultat de l’implantation des mesures : une diminution de 30 % de la consommation d’énergie en 2014 par rapport à 2012.
Concrètement, cette réduction représentait une économie estimée à un peu plus de 90 000 dollars après seulement deux mois d’opération, soit 18 % des coûts initiaux d’énergie s’élevant à 509 000 dollars. Les économies réalisées ont assuré un rendement de l’investissement en à peine 1,7 an. De surcroît, le suivi de l’opération sur une période de deux ans a permis de faire passer la cote énergétique Energy Star du bâtiment de 61 en octobre 2013 à 84 en juillet 2015, un facteur qui a en outre contribué à augmenter la valeur du bâtiment.
L’équipe en charge de l’application du plan de gestion de l’énergie de l’Université McGill peut également témoigner des économies réalisées grâce à diverses interventions de recommissioning réalisées depuis 2010. Le gestionnaire de l’énergie de l’institution montréalaise, Jérôme Conraud, précise que c’est en discutant avec le personnel voyant à l’opération des systèmes mécaniques de McGill « qu’on a constaté que [les] gros systèmes de ventilation n’étaient pas gérés de la façon la plus optimale et que ceux-ci présentaient un bon potentiel d’économies d’énergie ».
Par exemple, le personnel d’opération s’est rendu compte qu’il n’entrait pas les bonnes séquences de programmation en refroidissement, qu’il ne remplaçait pas les filtres assez souvent et que l’air ne contenait pas assez d’humidité dans certains pavillons du campus. Plutôt que de remplacer des équipements pour corriger le tir et réduire la consommation d’énergie, il a suffi de modifier les façons de faire dans la gestion des opérations et la maintenance des équipements.
Il est à noter que l’Université McGill a entamé sa démarche de recommissioning avec un projet pilote touchant trois bâtiments, sachant à l’avance qu’elle pourrait appliquer sensiblement les mêmes mesures correctives à l’ensemble de son parc constitué d’une trentaine d’immeubles. Seuls quatre ou cinq d’entre eux en ont été exclus en raison de la nécessité de remplacer d’abord leurs équipements devenus obsolètes.
Pour la première phase du recommissioning couvrant la période de 2010 à 2015, résume Jérôme Conraud, l’université a investi 1,6 million de dollars entre 2010 et 2011. L’application par le personnel à l’interne des mesures recommandées a permis de réaliser des économies d’énergie évaluées à 1,7 million de dollars, et ce, en moins d’une année (0,8 an). Il faut cependant préciser que l’Université a bénéficié d’une aide financière de 330 000 dollars pour cette période provenant d’Hydro-Québec, d’Énergir et de Transition énergétique Québec. Pour compléter la deuxième phase s’étendant de 2016 à 2020, l’institution n’a eu à investir que 400 000 de dollars à ce jour, mais les résultats restent à venir.
Stéphan Gagnon observe que pour plusieurs propriétaires et gestionnaires immobiliers qui ont réalisé des opérations de recommissioning ces dernières années, le succès ne semble pas faire de doute. Tant et si bien que certains d’entre eux jonglent déjà avec l’idée d’instaurer une procédure de recommissioning en continu pour s’assurer d’engranger des économies récurrentes résultant du maintien optimal de l’efficacité énergétique de leurs bâtiments.
- Optimiser le fonctionnement des systèmes mécaniques d’un immeuble
- Accroître l’efficacité énergétique
- Améliorer le confort des occupants
- Réduire les coûts d’opération et de maintenance
- Obtenir une bonne vue d’ensemble des investissements à planifier
- Faire affaire avec un agent de recommissioning accrédité
- Impliquer l’équipe d’exploitation et de maintenance des systèmes mécaniques
- Veiller à ce que le gestionnaire de l’immeuble complète toutes les étapes de la démarche
- La planification (qui, quoi, où, quand, comment, combien)
- L’investigation (évaluation, analyse et diagnostic)
- L’implantation (mesures correctives, remise au point)
- Le transfert (mise à jour, documentation, formation)
- Le suivi en continu des résultats pendant au moins deux ans
Transition énergétique Québec
Le programme ÉcoPerformance, offert par Transition énergétique Québec, fournit une aide financière spécifique pour les projets de remise au point des systèmes mécaniques (recommissioning). Pour en savoir plus sur ce programme, pour consulter d’autres exemples de projets ou pour trouver un agent accrédité, visitez le site Web.
Énergir
Énergir offre également une subvention pour encourager la remise au point des systèmes mécaniques d’un bâtiment. Pour en savoir plus ce sur ce programme, dans le cadre duquel l’appui financier peut atteindre 54 000 dollars, consultez le site Web.