Construire un bâtiment écologique en deçà du budget établi au départ, c’est possible. Le nouvel entrepôt trifluvien de Sobeys Québec inc. en fait la preuve.
En mai 2008, Sobeys Québec inc. (SQI) procédait à l’inauguration d’un nouveau centre de distribution. Situé dans le parc industriel de Trois-Rivières, cet établissement sert au transbordement de marchandises en transit et à l’entreposage de produits laitiers destinés à l’ensemble des supermarchés de la bannière au Québec. Jusque-là, rien de bien exceptionnel.
Sauf si l’on considère que cet entrepôt d’une superficie de 140 000 pieds carrés – 155 000 en comptant les aires administratives et de repos – souscrit aux normes les plus élevées en matière de construction durable. Et que les mesures mises de l’avant dans sa conception ont permis de réduire de 50 % sa consommation globale d’énergie et de retrancher 1,5 million de dollars à la facture du projet (sur un budget initial de 30 millions).
Comment ce géant de l’alimentation y est-il arrivé, sachant qu’un entrepôt frigorifique n’est ni plus ni moins qu’une boîte rudimentaire abritant des espaces à température contrôlée ? Pour Simon Bérubé, le directeur principal de l’aménagement commercial de SQI, la réponse est simple : « Il ne faut pas avoir peur d’innover, de remettre en question chacun des aspects de la conception », dit-il.
Le projet, soumis à l’examen du Conseil du bâtiment durable du Canada en vue de l’obtention de la certification LEED-NC Or, bouscule dès le départ certaines idées reçues. « Nos motivations étaient bien sûr écologiques, mais nous avions également en tête le bien-être de nos employés, souligne Simon Bérubé. Et quoi de mieux que la lumière du jour pour rendre plus agréable un milieu de travail. »
Cependant, l’installation de fenêtres dans un entrepôt réfrigéré fera forcément apparaître de la condensation sur le vitrage. Cette difficulté, l’équipe de SQI l’a contournée en installant des panneaux isolants translucides au bout de chaque allée ainsi qu’au-dessus des quais. Jumelés à des détecteurs de luminosité et de mouvement qui commandent l’éclairage, ils contribuent à réduire la consommation d’énergie.
Le recours à des panneaux structurels présentant une résistance thermique accrue améliore également la performance énergétique du bâtiment. Une performance renforcée par l’installation, en toiture, d’une membrane en polyoléfine thermoplastique dont la surface claire réfléchit les rayons solaires. En plus de bien résister au vieillissement, cette solution s’avère moins coûteuse qu’une membrane synthétique conventionnelle.
Sans compter qu’en diminuant les gains de chaleur en été, cette toiture blanche nécessite de ce fait un niveau d’isolation moindre. Et qui dit moins de matériaux, dit facture allégée. Ce raisonnement, l’équipe de l’aménagement de SQI l’appliquera également à la conception du stationnement et de la cour de l’entrepôt.
« En décalant de 15 minutes les quarts de travail, nous avons fait passer le nombre de cases de stationnement de 225 à 115, indique Simon Bérubé. Nous avons ainsi diminué de moitié les infrastructures et matériaux nécessaires à sa construction et nous épargnerons en frais d’entretien au fil des ans. »
Même chose en ce qui concerne la cour arrière de l’édifice, entièrement recouverte de béton compacté au rouleau (BCR). Le coût de cette option, plus élevé que celui de l’asphalte, est toutefois compensé par des travaux de fondation – excavation, remblai et compaction – moins importants et une durée de vie utile beaucoup plus grande.
Économies d’énergie et d’argent
C’est cependant la conception des groupes frigorifiques qui a permis à SQI d’économiser le plus d’énergie… et de sous. Grâce à la technologie dite du refroidissement gratuit (free cooling), qui fait appel à un échangeur de chaleur pour refroidir le bâtiment lorsque la température est inférieure à -12 °C, la salle mécanique de l’entrepôt de Trois-Rivières est en effet plutôt modeste.
Ce système a en effet permis de passer de 600 tonnes de réfrigération à 400 tonnes pour maintenir à 4 °C la température de l’entrepôt. « Nous avons établi nos besoins en procédant, en collaboration avec l’Université Concordia, à une simulation prenant en compte la masse thermique des produits finis, qui arrivent au centre à la température idéale, et la masse chaude des marchandises en transit, qui réchauffent l’air ambiant, explique Simon Bérubé.
« Cela nous a permis d’épargner un million de dollars en équipement, poursuit-il. Et notre bilan énergétique est amélioré par la récupération de la chaleur émise par les compresseurs, qui est redistribuée pour chauffer les bureaux et la cafétéria. Si bien qu’en été notre entrepôt consomme 25 % moins d’énergie qu’un bâtiment standard de même dimension et qu’en hiver les économies avoisinent les 80 %. »
En construisant cette véritable vitrine écologique et technologique, SQI ne visait pas seulement une reconnaissance environnementale. Elle souhaitait également faire profiter tous les marchands de son réseau de ces avancées technologiques. C’est d’ailleurs dans cette optique que le toit surmontant l’aire de repos des employés a été végétalisé.
Cette expérience, qui concerne une superficie de 10 000 pieds carrés ornée de plantes indigènes, permettra de mesurer, au moyen d’un débitmètre, le volume d’eau absorbé par la couverture végétale. « Certaines municipalités exigent l’installation d’une citerne pour recueillir la pluie et diminuer la pression sur l’infrastructure publique, note Simon Bérubé. Si elle s’avère concluante, la végétalisation des supermarchés permettra à nos membres de réduire leurs frais d’exploitation de façon substantielle. »
Architecture Consortium GKC / BTA
Mécanique du bâtiment Martin Roy et associé
Structure SDK
Protection incendie Civelec
Entrepreneur général Construction Première
Génie civil Roxboro Excavation
Réfrigération Aubin Pélissier
- Développement minimal du site et préservation de la nature environnante
- Diminution de la pollution lumineuse au moyen de lampadaires orientés vers le sol
- Aménagement d’une aire de stationnement pour vélos et d’un vestiaire avec douches
- Traitement des eaux grises par bassin de roseaux épurateurs
- Captation des eaux de ruissellement provenant du toit, du stationnement et de la cour de l’entrepôt et interception des particules et des hydrocarbures
- 75 % des rebuts détournés de l’enfouissement
- Contenu en matériaux recyclés supérieur à 15 %
- Utilisation de bois certifié FSC (Forest Stewardship Council)
- Plus de 20 % des matériaux provenant d’un rayon de 500 km
- Optimisation continue des systèmes mécaniques
Catégorie | Points |
Aménagement écologique des sites | 08 |
Gestion efficace de l’eau | 05 |
Énergie et atmosphère | 07 |
Matériaux et ressources | 07 |
Qualité des environnements intérieurs | 09 |
Innovation et processus de design | 05 |
Total | 42 |
* Crédits soumis à l’examen du CBDCa