Aller au contenu principal
x

BIM-PCI : leadership collaboratif

6 mars 2024
Par Rénald Fortier

La Société québécoise des infrastructures (SQI) accentue ses efforts pour favoriser l’adhésion au BIM-PCI dans l’industrie de la construction au Québec. À l’heure de l’accélération de la transition numérique.

Collaboration. Voilà un mot qui résonne doux aux oreilles de Guy Paquin, directeur général des Stratégies et des projets spéciaux à la SQI. Parce qu’il désigne le fondement des modes de gestion de projets innovants que cette organisation veille à implanter depuis les dernières années. Pour réduire les risques inhérents à la réalisation de tout projet, que ce soit du point de vue financier ou de celui des échéanciers, mais aussi pour favoriser sa réalisation dans une perspective durable.

Au premier chef figure le déploiement du BIM (acronyme anglais de Building Information Modeling aussi aujourd’hui employé pour désigner la modélisation des données des infrastructures) et du PCI, raccourci désignant le processus de conception intégrée. Pour Guy Paquin, l’un et l’autre vont invariablement de pair. Il explique : « Ce sont deux approches qui se rejoignent et s’accompagnent de bénéfices certains. Le PCI amène les différents acteurs de l’industrie à sortir des sentiers battus et de leur zone de confort à l’intérieur d’un processus qui doit mener à la recherche des meilleures solutions, souvent innovantes. Le BIM, lui, est un outil qui facilite la communication par le visuel et les données qui peuvent être rapidement comparées pour aider à la prise de décision. »

De là à penser que la SQI met tout en œuvre pour promouvoir le recours au BIM-PCI afin de gagner en efficience dans le cadre de ses projets, mais aussi pour contribuer à aiguiser les réflexes collaboratifs au sein de l’industrie, il n’y a évidemment qu’un pas qu’elle a formellement franchi d’un trait en 2016. Comme elle l’avait fait pour favoriser l’adhésion au mouvement en faveur du bâtiment durable en exigeant des certifications LEED et BOMA BEST (Visez vert et Visez vert plus à l’époque) à compter du milieu de la première décennie 2000.

Il faut dire que la SQI est bien placée pour influencer l’adoption de modes de gestion collaboratifs, et du coup la transition numérique, en sol québécois. De savoir qu’elle gère un parc immobilier totalisant plus de 3,2 millions de mètres carrés, dont 355 immeubles en propriété, suffit vite à en prendre la mesure. C’est sans compter qu’elle octroie pour 3,5 milliards de dollars de contrats annuellement et que la valeur de son portefeuille de projets, sous gestion ou en planification, et en association, s’élève à pas moins de 44 milliards.

Accélération numérique

Rien d’étonnant, donc, à ce qu’elle ait réussi à donner une véritable impulsion au virage numérique du milieu du bâtiment ces dernières années. « Au départ, on visait la réalisation de 15 projets majeurs en BIM-PCI pour 2020-2021, cible que nous avons déjà atteinte à la fin de 2019, indique l’ingénieur Guy Paquin. Et en date du 31 mars 2023, on en était rendu à 84 projets BIM, d’une valeur cumulative de 24,1 milliards de dollars, et à 146 projets PCI totalisant 27,2 milliards.

Forte des résultats obtenus à ce jour, la SQI n’en est plus à introduire pas à pas le BIM-PCI dans le cadre de certains de ses projets. Dans son plus récent Plan stratégique, elle indique qu’elle vise à ce que 85 % de ses projets soient ainsi réalisés à l’horizon 2026-2027, ceci en soulignant sa volonté de renforcer la relation avec ses partenaires, dans le but, notamment, de contribuer à l’amélioration de l’efficacité du secteur de la construction et de l’immobilier par un meilleur échange d’information sur l’ensemble du cycle de vie des infrastructures.

Et elle entend justement, à cette fin, poursuivre ses approches en modélisation et conception intégrée et aussi introduire un nombre grandissant d’usages du BIM, sur une plus grande partie du cycle de vie de l’infrastructure, notamment son exploitation.

L’heure est plus que jamais à l’accélération de la transition numérique non seulement dans le secteur du bâtiment, mais aussi de l’infrastructure.

« Maintenant, indique Guy Paquin, tous les projets gérés par nos directions des projets majeurs, soit ceux de plus de 10 millions de dollars, doivent être réalisés en mode BIM-PCI. Nous nous en sommes aussi tenus au départ à la dimension 3D du BIM, mais désormais nous allons accentuer nos efforts pour aller vers le 4D, le 5D, le 6D et le 7D. »

À ses yeux, le moment est venu de passer à une vitesse supérieure, entre autres parce que l’industrie a gagné en maturité sur le plan de l’appropriation du BIM-PCI au fil des dernières années, bien qu’il reste encore beaucoup à faire. Et ceci, notamment, dans la foulée du déploiement de l’Initiative québécoise pour la construction 4.0 (IQC 4.0). Administrée par Groupe BIM du Québec et l’Institut de la gouvernance numérique, rappelons-le, l’IQC 4.0 a été mise sur pied pour permettre aux différents acteurs du milieu de la construction de profiter de diagnostics numériques offerts sans frais, mais aussi d’un soutien financier pour obtenir la formation et l’accompagnement requis pour mener à bien une démarche de transition numérique, sinon pour pousser plus loin leur avancée en ce sens.

Feuille de route

Les différents acteurs de l’industrie ont d’autant plus intérêt à prendre le virage numérique rapidement, du moins s’ils ne veulent pas s’exclure à terme de lucratifs marchés publics – voire privés aussi avec l’expérience acquise sur des projets tels ceux de la SQI, en raison du déploiement en 2021 de la feuille de route pour la mise en œuvre du BIM dans le cadre du Plan d’action pour le secteur de la construction du gouvernement du Québec. Outre la SQI et le ministère des Transports et de la Mobilité durable, coporteurs de la feuille de route, les donneurs d’ouvrage publics impliqués à ce jour sont : la Société d’habitation du Québec, le Parc olympique, Hydro-Québec, la Ville de Longueuil, la Ville de Montréal et la Ville de Québec.

L'objectif de cette feuille de route est d'établir la cadence d'implantation du BIM en se dotant de cibles concrètes et réalistes pour amorcer un virage numérique important en matière de conception, de construction et d'exploitation des infrastructures publiques, et ce, tout autant pour les bâtiments que les ouvrages de génie civil. Chacune des entreprises impliquées dans l’un ou l’autre des écosystèmes de la construction pourra ainsi planifier sa transformation numérique et s’y préparer avant de se lancer dans un projet réalisé avec les processus et outils BIM.

« C’est pour ça qu’aujourd’hui, on parle de modélisation des données des infrastructures même si on continue d’utiliser l’acronyme BIM. Parce qu’aujourd’hui, dit Guy Paquin, le BIM est appelé à s’intégrer dans quatre écosystèmes. Celui des bâtiments institutionnels, soit notre créneau, mais aussi ceux de l’habitation, des ouvrages de génie civil et voirie ainsi que des actifs industriels, comme les postes d’Hydro-Québec.

« Les différents acteurs de l’industrie ont tout à gagner à adhérer au BIM, et plus tôt que tard, tout comme les donneurs d’ouvrages. Et nous sommes sur la bonne voie », conclut-il.

Les bénéfices du BIM
  • Augmentation de la productivité et de l’agilité, notamment par l’amélioration du travail collaboratif et la réduction des demandes de changement en chantier
  • Meilleur partage des données en temps réel permettant de réduire les délais grâce à une communication améliorée et à une collaboration accrue entre les différents intervenants
  • Efficience augmentée et réduction des risques d’erreurs grâce au regroupement des données et des intrants sur une même plate-forme technologique accessible à tous les intervenants (concepteur, entrepreneur, exploitant, etc.)
  • Possibilité de visualiser les projets en trois dimensions et de juxtaposer leurs multiples facettes, ce qui favorise une meilleure compréhension du projet par toutes les parties prenantes et permet ainsi de déterminer plus rapidement les modifications à apporter et de déceler en temps réel les erreurs ou les omissions, réduisant du coup les reprises au chantier.
  • Contrôle renforcé des coûts de construction par une planification et une estimation plus juste
Reconnaissance de l'industrie

En début d’année 2023, Guy Paquin recevait le Prix d’excellence professionnelle 2022 de l’organisme Building Transformations, dans le cadre de la 83e édition des Innovation Spotlight Awards, soulignant ainsi sa contribution à la promotion de l’innovation et la transformation numérique dans l’industrie du bâtiment et des infrastructures non seulement au Québec, mais aussi ailleurs au pays.

Guy Paquin. Photo : Gracieuseté

Gestionnaire sénior spécialisé en gestion de projets et membre de l’Ordre des ingénieurs du Québec, il possède plus de 40 ans d’expérience dans la réalisation de projets d’infrastructures de tout type, autant dans le secteur public que privé, au sein de diverses entreprises et firmes d'ingénierie.

Promoteur des approches collaborative et intégrée, il porte l’évolution des pratiques de la SQI depuis plus d’une décennie. Sa vaste expérience lui permet de saisir toute l’importance de réunir la gestion de projets, la transformation numérique (BIM), l’aspect humain et collaboratif (PCI) et une gouvernance de projets performante (modes de réalisation de projets). Un système cohérent développé pour que cette transformation des façons de faire devienne une réponse concrète aux risques inhérents à la construction des infrastructures publiques.