Marie-Noëlle Deblois
Et si on créait une oasis alimentaire à Pointe-Saint-Charles ? Voilà le défi que s'est donné un regroupement d'organismes communautaires du quartier, Le Collectif 7 à Nous . Coup d’œil sur le projet du Bâtiment 7, une initiative durable portée par le milieu.
En 2012, le collectif acquiert un ancien bâtiment désaffecté du CN afin d'y développer un important pôle communautaire et alimentaire. Dans le cadre de la 6e édition de l'École d'été d'agriculture urbaine, une dizaine d'étudiants et de professionnels ont été invités à penser la nouvelle programmation du Bâtiment 7.
Pointe-Saint-Charles est un secteur de Montréal qualifié de « désert alimentaire » par la Direction de la santé publique. On désigne ainsi les quartiers de Montréal où l’accès à des fruits et légumes frais se situe à plus de 500 mètres de distance des habitations. C'est donc afin d'assurer la sécurité alimentaire des résidents que l'idée d'un espace dédié à la production et la transformation d'aliments fait son apparition.
Et les avenues possibles ne manquent pas : marché, serres pour les jardins potagers, espaces pour enfants, toits verts, écuries, ateliers d’artistes, café-restaurant-bar-salle de spectacle, ce ne sont là que quelques-unes des idées qui ont été proposées.
De pôle industriel à pôle alimentaire
En 2006, le Groupe Mach devient propriétaire, pour la somme de un dollar, de l'ancien site du Canadien National à Pointe-Saint-Charles. Il s'engage alors à décontaminer et piloter le redéveloppement de l'espace d'une superficie de 3,5 millions de pieds carrés.
Après de nombreux pourparlers et devant la constatation populaire, la Ville de Montréal adopte, six ans plus tard, l'accord de développement et revitalisation des anciens Ateliers du CN de Pointe-Saint-Charles. Le vaste site comprendra, au nord, les futurs ateliers de l’Agence métropolitaine de transport. Au sud, plus de 1 000 unités d'habitation seront développées par le promoteur immobilier Samcon, soit 800 copropriétés et 225 unités de logement social.
Le Bâtiment 7, lui, sera cédé à l'organisme communautaire Le Collectif 7 à Nous, en plus d'une somme d’un million de dollars pour entreprendre l'aménagement de celui-ci. D'une superficie totale de 90 000 pieds carrés, répartis sur deux étages, l’immeuble est un véritable témoin de l’histoire industrielle de Montréal. Sa construction s’est échelonnée des années 1924 aux années 1960. Laissé à l'abandon depuis une dizaine d'années, il servait à l'époque de bureaux et d'entrepôt pour l'entreprise ferroviaire.
Le projet de reconversion prévoit respecter le caractère patrimonial du bâtiment en conservant le maximum d’éléments en place. Mark Poddubiuk, architecte s’activant au sein du Collectif 7 à Nous, souligne néanmoins que celui-ci est dans un piteux état : « Le bâtiment se détériore davantage au fil des ans, particulièrement la façade nord. Comme il n'y a pas de chauffage, pas d'électricité et pas d'eau courante, il est primordial de commencer les travaux rapidement. »
Stratégies écologiques
Plusieurs stratégies écologiques pourraient être intégrées au projet. Comme la récupération des eaux de pluie pour alimenter les jardins et l'installation d'un système de géothermie pour chauffer et climatiser les lieux.
« L'idée du Bâtiment 7 est de développer un noyau de services capables de répondre aux besoins des résidents du quartier et donc, à la problématique de la sécurité alimentaire », explique Mark Poddubiuk. En plus de regrouper des organismes et services, la structure du bâtiment de béton a été conçue pour soutenir jusqu'à 1 000 livres le pied carré, ce qui permettrait d'y aménager une serre.
Au sud du bâtiment, un terrain de 3 900 pieds carrés bénéficiant d'un important apport de lumière naturelle pourrait devenir un grand jardin. Une place du marché et une allée piétonnière, réalisées en collaboration avec la Ville de Montréal, viendraient compléter l'aménagement.
Si, pour le moment, le projet évalué à 10 millions de dollars est encore en gestation, Mark Poddubiuk a bon espoir de voir celui-ci se réaliser au cours des cinq prochaines années. D'ici là, le défi consiste à trouver le financement nécessaire afin de faire de ces friches industrielles un véritable pôle alimentaire.