La Société immobilière du Québec (SIQ) entend pousser encore plus avant son engagement environnemental, tout en entraînant ses partenaires d’affaires dans son sillage. Richard Verreault, son président, explique.
Par Rénald Fortier
Première moitié des années 2000. Le courant qui porte le développement durable commence à peine à souffler au Québec que, déjà, la SIQ imprime son leadership à cet égard au sein de l’industrie immobilière. Non seulement en adoptant des pratiques écologiques pour la construction, la rénovation et la gestion de ses immeubles, mais aussi en se donnant des moyens pour baliser ses actions et attester de leur efficience.
C’est ainsi que dès 2005, elle vise l’obtention de la certification LEED pour tous ses projets de construction de 5 millions de dollars et plus, seuil qui sera abaissé à 2,5 millions l’année suivante. Et qu’à partir de 2005, elle souscrit successivement aux programmes Visez vert et Visez vert plus, aujourd’hui BOMA BESt, pour renforcer la saine gestion environnementale de son parc immobilier.
Il faut dire que la SIQ prône déjà alors depuis longtemps l’application de pratiques écoresponsables dans le cadre de sa gestion immobilière. À commencer par l’optimisation de l’efficacité énergétique de ses bâtiments, dont elle fait son crédo depuis sa création voilà maintenant plus de 25 ans. Une préoccupation économique à l’origine – elle visait essentiellement à réduire la facture d’exploitation du parc immobilier gouvernemental – qui se double d’une dimension écologique au fils des ans.
Cette recherche constante d’efficacité énergétique est d’ailleurs au cœur de la politique de développement durable que se donne la société d’État en 2006. Et autour de laquelle se déploie l’intégration de mesures visant notamment la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’économie de l’eau potable, la conformité aux standards les plus élevés en matière de qualité de l’air intérieur, l’utilisation de produits renouvelables, la gestion efficace des déchets de construction et le recyclage multimatière.
Autant d’efforts qui, à l’évidence, ont porté fruit : aujourd’hui, la SIQ compte 93 immeubles certifiés BOMA BESt, soit près de 90 % de ses espaces admissibles au programme ; un bâtiment certifié LEED pour les nouvelles constructions (NC), à savoir le poste de la Sûreté du Québec de Victoriaville ; 11 édifices en instance d’une certification LEED-NC auprès du Conseil du bâtiment durable du Canada ; et un espace en location, sur la Rive-Sud, en voie de briguer le sceau LEED-CI (Commercial Interiors).
Une feuille de route écologique pour le moins éloquente, certes, mais qui est loin d’être un aboutissement pour la SIQ. Car aux yeux de son président et chef de la direction, Richard Verreault, elle constitue plutôt un tremplin pour porter à un niveau supérieur son engagement environnemental : « Le développement durable, indique celui qui est en poste depuis un peu plus d’un an, c’est une couleur qui va teinter toutes nos actions dans l’avenir. D’autant plus qu’à titre de gestionnaire du parc immobilier du gouvernement du Québec, nous avons le devoir de montrer la voie à suivre. »
C’est d’ailleurs pourquoi le développement durable est l’une des quatre grandes priorités autour desquelles s’articule le Plan stratégique 2009-2012 de l’entreprise. Les cibles environnementales qui y ont été fixées sont pour le moins ambitieuses, tant sur le plan de la construction des immeubles que sur celui de leur exploitation. À telle enseigne que la SIQ s’est aussi donné un plan de match pour guider ses actions.
« La SIQ a accompli de belles choses ces dernières années, observe Richard Verreault, mais peut-être de façon plus intuitive. Avec notre planification stratégique et notre plan d’action de développement durable 2009-2012, nous établissons clairement des objectifs et les moyens à déployer pour les atteindre. Nous aurons des comptes à rendre à notre conseil d’administration et, aussi, au gouvernement. C’est sérieux. »
Seulement du côté de la consommation énergétique des bâtiments, la société d’État vise une réduction de 17 % d’ici trois ans. Déjà en avril dernier, elle affichait une diminution de 13 % alors que l’objectif gouvernemental était de 10 % pour la période 2003-2010. C’est donc de son propre chef qu’elle consentira un effort additionnel pour améliorer encore davantage sa performance à ce chapitre. Et qui lui permettra, du même coup, de viser une baisse de ses émissions de gaz à effet de serre de 30 % pour 2012, elle qui s’établissait déjà à 22 % au 1er avril 2009.
Influencer le marché
Si la SIQ monte plus haut la barre environnementale pour sa gestion immobilière, elle s’attend à ce que l’industrie fasse de même. Car en plus de contribuer à la protection de l’environnement et à la préservation des ressources naturelles, ainsi que de fournir des milieux de travail sains et confortables aux ministères et organismes publics, elle entend aussi accentuer ses efforts pour entraîner ses partenaires d’affaires dans son sillage. Autant les constructeurs et professionnels du bâtiment qui lui fournissent des services que les propriétaires immobiliers qui lui louent des espaces.
Il faut dire que la SIQ est bien placée pour favoriser l’essor du bâtiment durable en sol québécois. Elle gère un parc immobilier totalisant près de 3 millions de mètres carrés, répartis dans plus de 1 000 édifices en propriété et en location aux quatre coins de la province. Représentant un actif de près de 2 milliards de dollars, il comprend des immeubles de bureaux et des entrepôts, de même que de nombreuses installations spécialisées comme des postes de police, des palais de justice, des établissements de détention ou des centres de transport.
Pour illustrer son pouvoir d’influence, soulignons simplement que l’entreprise d’État investit bon an mal an quelque 500 millions de dollars dans la location d’espaces sur le marché privé, l’entretien des immeubles ainsi que les travaux d’aménagement, de rénovation et de construction.
« Nous voulons contribuer à changer les comportements sur le marché, particulièrement du côté de la location. Nous avions commencé avec l’inclusion de clauses vertes dans nos baux, ces dernières années, mais là nous allons beaucoup plus loin en resserrant nos exigences environnementales, comme l’obtention de la certification BOMA BESt ou LEED-CI selon les cas », indique Richard Verreault, en soulignant que les attentes envers les fournisseurs de la construction ne seront pas en reste.
« Nous avons pour près de un milliard de dollars de projets dans nos cartons, si on compte ceux qui sont en chantier et sur la table à dessin, conclut-il, et les fournisseurs qui veulent faire affaire avec nous vont nécessairement devoir répondre à nos nouvelles exigences environnementales. Nous avons de grandes ambitions, nous donnons l’exemple et nous n’attendons rien de moins que tous le suivent. »
- Réduire de 17 % la consommation énergétique globale des immeubles en propriété par rapport à l’année de référence 2002-2003
- Diminuer de 30 % les GES émis par les immeubles en propriété (p/r à 2002-2003)
- Certifier 100 % des immeubles en propriété admissibles au programme BOMA BESt
- Soumettre à une évaluation équivalente à BESt 50 % des superficies en propriété non admissibles au programme
- Obtenir la certification LEED-NC pour tous les édifices en propriété dont le budget de réalisation est supérieur à 2,5 millions de dollars
- Obtenir la certification LEED-CI pour 75 % des projets d’aménagement de plus de 1 000 mètres carrés en propriété et dont la conception aura débuté après le 1er avril 2009
- Exiger BOMA BESt pour tous les immeubles en location admissibles au programme dans lesquels un bail de plus de 1 000 mètres carrés et plus a été conclu à la suite d’un appel d’offres émis après le 1er avril 2009 (certification effective au plus tard un an après à conclusion du bail)
- Obtenir la certification LEED-CI pour 75 % des projets d’aménagement de plus de 1 000 mètres carrés réalisés dans des immeubles en location, dont l’appel d’offres pour un bail de 10 ans et plus a été lancé après le 1er avril 2009.
La SIQ entend favoriser le développement de nouvelles technologies vertes au cours des prochaines années. Particulièrement en utilisant ses immeubles comme bancs d’essai pour l’expérimentation de systèmes et de matériaux novateurs ainsi que de sources d’énergie renouvelables. Dans ce dernier cas, elle privilégiera l’utilisation de la géothermie, ou à défaut l’hydroélectricité, pour ses projets de construction ou de rénovation majeure.
Dans cette même foulée, soulignons que la SIQ adhère à la politique d’utilisation du bois adoptée par le gouvernement au printemps 2008 et que l’Atrium de Québec promet d’être une vitrine pour le bois d’apparence québécois au terme de la rénovation dont fera l’objet cet édifice.
Photo : Louise Leblanc