CHRONIQUE DE BÂTIMENT DURABLE QUÉBEC
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- Monika Frontczak
Malgré leur impact majeur sur la qualité de vie des gens et la performance des entreprises qui les emploient, les niveaux de confort et de productivité perçus au travail demeurent des paramètres que la majorité des acteurs du domaine de la construction et de l’immobilier considèrent trop rarement.
C’est bien malheureux car, dans le contexte socio-économique actuel, la rentabilité et la performance des environnements de travail ne peuvent plus être uniquement quantifiées en thermes immobiliers. Plus que jamais, des considérations relatives au confort de l'occupant dans son milieu de travail s'avèrent essentielles pour maximiser le rendement sur le capital investi de façon globale. Plus facile à dire qu’à faire, nous en conviendrons…
Force est d’admettre que la dimension subjective du confort et la productivité perçue ainsi que leur complexe interdépendance ne facilitent en rien la tâche des équipes et des professionnels souhaitant considérer ces variables lors de la conception d’un projet architectural. Dans le but d’y voir plus clair, bon nombre de chercheurs s’intéressent à la relation unissant les occupants et le confort. C’est entre autres le cas de Monika Frontczak qui en a fait le sujet de sa thèse de doctorat[1].
Revue de la littérature
Sans grande surprise, la littérature consultée par Monika Frontczak indique que les dimensions thermique, acoustique, visuelle et de la qualité de l’air influencent l’appréciation des environnements de travail. Par contre, il importe de mentionner que la dimension thermique est, de manière générale, jugée comme étant celle ayant le plus d’impact sur le niveau de confort global perçu. Au-delà des aspects précédemment discutés, plusieurs autres facteurs influencent eux aussi le niveau de confort perçu, tels que le type de bâtiment, les caractéristiques personnelles des travailleurs, le climat extérieur, etc.
Mentionnons que le niveau de satisfaction global de la force de travail est aussi grandement influencé par la qualité des installations et des équipements mis à sa disposition. Concrètement, il est ici question de confort fonctionnel, soit la capacité des environnements de travail à permettre aux occupants de réaliser avec efficience les tâches qui leur sont confiées. Évidemment, il est aussi question de confort psychologique, par exemple de la qualité spatiale des espaces ou encore des vues sur l’extérieur offertes. Toujours en lien avec le volet psychologique du confort, notons que plus le niveau de contrôle offert aux occupants est élevé, plus leur impression de confort est grande.
Satisfaction et performance perçue
Ayant analysé plusieurs milliers de données issues de sondages menés par le Center for the Built Environement (CBE) de l’Université de Californie sur une période de 10 ans[2], Monika Frontczak a pu identifier une corrélation positive entre la satisfaction en milieu de travail et la perception de performance. L’auteur observe, entre autres, qu’une augmentation de 15 % de la satisfaction globale d’un employé par rapport à son poste de travail personnel permettrait de bonifier de l’ordre de 3,7 % la perception de productivité qu’a cette personne de son propre travail. Inévitablement, un occupant se percevant plus performant verra son niveau de plaisir et de motivation affecté à la hausse, ce qui, ultimement, profitera aussi à son employeur.
Bien sûr, d’autres études et recherches devront être réalisées avant que l’on puisse prétendre tout connaître et tout comprendre du confort et de la productivité perçus en milieu de travail. Cela dit, des conclusions telles que celles tirées par Monika Frontczak (et plusieurs autres chercheurs s’intéressant à la psychologie des environnements de travail) pavent lentement, mais sûrement, la voie à des exercices de conception mieux informés et par conséquent à de futurs milieux de travail qui seront, espérons-le, parfaitement adaptés aux besoins et aspirations de leurs occupants.
[1] Frontczak, M. (2012) Human comfort and self-estimated performance in relation to indoor environmental parameters and building features, thèse de doctorat, Department of Civil Engineering, Technical University of Denmark.
[2] Données issues de 397 sondages, réalisés dans 351 bâtiments distincts et auprès de 52 980 répondants
Par François Cantin, M. Sc. Arch.
L’auteur est chargé de projet chez Coarchitecture, spécialiste des stratégies d’occupation et du confort de l’occupant au sein des environnements de travail, formateur pour le Centre de formation en développement durable de l’Université Laval ainsi que bénévole pour la section de Québec du CBDCa.