Recyclage d’un immeuble délabré, aménagement écoresponsable des espaces intérieurs, contribution à la revitalisation d’un quartier… Bienvenue dans le nouvel univers durable du 734, Saint-Joseph Est, à Québec.
Il aurait pourtant été si facile d’ignorer tout simplement cet immeuble délabré datant de 1910. Mais non, c’est bel et bien là que la firme d’architecture Lemay et le manufacturer de mobilier de bureau Artopex décident tour à tour d’élire domicile en location vers la fin de 2013. La première afin d’y reloger son bureau de Québec, le second pour y établir sa nouvelle salle d’exposition dans la Capitale-Nationale.
Là, c’est au 734, Saint-Joseph Est, au cœur de Saint-Roch. Une rue commerciale chargée d’histoire traversant d’est en ouest ce quartier qui fut jadis florissant avant d’amorcer un long déclin à partir des années 1960, puis de renaître peu à peu avant le tournant du siècle. Au point de se poser aujourd’hui comme un lieu tout aussi branché qu’animé.
« L’immeuble était vraiment en piteux état et seul un commerce s’y activait encore au rez-de-chaussée, les trois étages supérieurs ayant depuis longtemps été laissés à l’abandon, relate Annie Martineau, architecte, chargée de projet chez Lemay. Aux étages, on pouvait même voir à travers les planchers de bois à certains endroits. C’est dire. »
N’empêche que ce bâtiment tout enveloppé de briques, qui abritait à l’origine une entreprise donnant dans le commerce de la fourrure, laissait malgré tout entrevoir un potentiel intéressant sur le plan de l’aménagement intérieur. Tout comme sur celui de la mise en valeur de sa facture architecturale d’époque.
Autant de bonnes raisons qui, combinées à une volonté d’ajouter une nouvelle pierre à la revitalisation du quartier, amènent Lemay à s’y installer. Non sans décider dès lors de draper de vert l’aménagement de ses nouveaux espaces qui occuperont les 4 000 pieds carrés du quatrième et dernier étage.
Il en va de même pour Artopex, dont la salle d’exposition s’étalera sur une surface de plancher équivalente deux étages plus bas. Un aménagement dont le design écoresponsable portera lui aussi l’empreinte de Lemay.
Mais auparavant, encore faut-il donner un nouveau souffle au vénérable édifice à ossature de bois. Une rénovation de fond en comble que voit à concevoir Lemay, de concert avec la firme québécoise d’efficacité énergétique Ecosystem. Et qui vise à faire du 734, Saint-Joseph Est, un lieu de travail sain et confortable, mais aussi à optimiser sa performance énergétique et réduire le plus possible sa consommation d’eau potable.
Menée en mode accéléré à partir du printemps 2014, cette rénovation s’inscrit également dans une perspective durable, elle qui vise d’ailleurs l’obtention d’une certification LEED-NC de niveau Or. Côté architectural, les travaux touchant le noyau et l’enveloppe du bâtiment se traduisent notamment par l’enlèvement du crépi – ou plutôt de ce qu’il en restait – et de l’amiante recouvrant les murs intérieurs, le renforcement structural et la mise à niveau de certains planchers ainsi que la mise en place d’une toiture blanche.
Côté électromécanique, les interventions portent plus particulièrement sur l’installation d’un nouvel ascenseur, la mise en place d’appareils de plomberie à faible débit ainsi que l’intégration d’équipements de chauffage, de ventilation et de climatisation performants.
« Deux critères ont principalement guidé le design des systèmes électromécaniques, indique Olivier Matte, ingénieur chez Ecosystem. De un, il nous fallait utiliser les équipements les plus efficaces possibles et, de deux, minimiser l’empiétement sur l’espace utile dans le bâtiment pour maximiser les aires de travail. »
C’est ainsi que plutôt que de véhiculer de grands volumes d’air pour chauffer et climatiser les espaces, on a fait en sorte que la ventilation apporte seulement le minimum d’air neuf dans le bâtiment. Comment ? En y recirculant l’air au moyen de plusieurs petites thermopompes qui, ingénieusement dissimulées en différents endroits dans l’entreplafond sur chaque étage, sont couplées à un réseau hydronique.
« Chacune des thermopompes reçoit son air neuf d’une unité au toit. Ainsi, au lieu de faire de l’apport d’air neuf et de la recirculation, ce qui nous aurait nécessité l’installation de gros conduits de ventilation, on a pu recourir à de petits conduits pour amener tout l’air neuf qui doit être distribué par les thermopompes », explique Olivier Matte, en soulignant que plusieurs stratégies ont été appliquées pour concourir à l’optimisation éconergétique de l’immeuble. Comme la récupération de l’énergie de l’air vicié évacué, la mise en place de dalles radiantes au périmètre des zones fenêtrées et l’utilisation d’une chaudière d’appoint à condensation.
Les dimensions durables intégrées au design des espaces intérieurs ne sont pas en reste, loin de là, tant à l’étage occupé par les bureaux de Lemay qu’à celui logeant la salle d’exposition d’Artopex. « Dans un cas comme dans l’autre, note Annie Martineau, l’idée était de créer des espaces ouverts baignés de lumière naturelle et favorisant la collaboration entre les employés, de même qu’avec les clients et partenaires. »
Elle signale également que l’on a cherché à recourir le plus possible à des matériaux à contenu recyclé et de provenance régionale. En plus de miser sur une réduction de l’utilisation de finis architecturaux en laissant apparents la plus grande partie des murs de briques, les plafonds ainsi que les poutres et colonnes de bois.
Francis Pelletier, vice-président au marketing d’Artopex, n’est pas peu fier du résultat : « C’est un lieu qui a beaucoup de cachet, notamment avec ses murs de brique, et qui est très lumineux, dit-il. Nous disposons maintenant à Québec d’une salle d’exposition aménagée de bout en bout de façon écoresponsable et qui met pleinement en valeur notre ameublement de bureau conçu et produit dans une perspective écologique. »
Soulignons que la requalification du 734, Saint-Joseph Est, n’est pas encore terminée. Il reste le troisième étage à aménager, de même que l’espace commercial situé au rez-de-chaussée. L’écologisation se poursuit.
Architecture et design d’intérieur : Lemay
Conception et implantation des systèmes électromécaniques : Ecosystem
Construction : Pomerleau
Expertise LEED : Lemay, en collaboration avec Ecosystem
Éclairage : LumiGroup
Architecture et design d’intérieur : Lemay
Génie électromécanique (distribution) : WSP
Construction : Les constructions Pierre Blouin
Éclairage : LumiGroup
Mobilier de bureau : Artopex
Plancher : Mirage
- Réduction de la consommation énergétique de 41 % par rapport au standard de la norme ASHRAE 90.1 2007
- Abaissement de la consommation d’eau potable de tout près de 37 % en comparaison des exigences du système d’évaluation LEED
- Détournement de l’enfouissement d’un minimum de 75 % des matières résiduelles générées lors de l’exécution des travaux
- Requalification d’un bâtiment désaffecté
- Conservation de la structure en bois d’origine
- Conservation des fenêtres en façade
- Installation de nouvelles fenêtres Low-e à vitrage double à l’arrière
- Conception des aménagements intérieurs pour profiter d’un maximum de luminosité naturelle
- Enlèvement de l’amiante
- Réduction de l’utilisation de matériaux de finition
- Recours à des finis et du mobilier à faible émissivité de COV
- Utilisation de matériaux à contenu recyclé et de provenance régionale
- Réutilisation de 80 % du mobilier en place dans les bureaux auparavant occupés par Lemay à Québec
- Utilisation d’ameublement de bureau à faible émissivité de COV, à contenu recyclé et recyclable (Artopex)
- Recours à des cloisons amovibles vitrées permettant de réaménager les espaces sans générer de matières résiduelles
- Aménagement d’une toiture blanche
- Installation d’appareils de plomberie à faible consommation d’eau potable : toilettes, 3,79 litres/chasse ; robinetterie, 1,89 litre/minute
- Aménagement d’une terrasse et de végétaux sur la toiture (à venir)
- Végétalisation de la cour latérale (à venir)
- Et autres
- Recours à la luminosité naturelle
- Éclairage artificiel à la DEL
- Apport de gains solaires passifs
- Utilisation des murs de brique au sud comme accumulateurs thermiques
- Recirculation de l’air dans le bâtiment au moyen de thermopompes eau-air d’une capacité variant entre une et trois tonnes (cinq appareils par étage à la base et auxquels d’autres peuvent s’ajouter en fonction des aménagements)
- Mise en place d’un réseau hydronique dans lequel les thermopompes puisent ou rejettent de la chaleur ou du froid
- Installation d’un plancher radiant au périmètre des zones fenêtrées
- Unité de toit munie d’une roue thermique permettant la récupération de la chaleur de l’air vicié évacué pour préchauffer l’air neuf amené aux thermopompes sur chaque étage
- Lorsqu’il y a un déficit de chaleur dans la boucle d’eau glycolée en période hivernale, une chaudière à condensation de 800 000 Btu/h est utilisée pour alimenter en priorité les dalles radiantes et en second lieu pour chauffer l’air neuf de l’unité de toit