Gros plan sur le bâtiment LEED v4 Platine du Local 144

Cette reconnaissance, le plus haut niveau de certification pouvant être atteint chez LEED Canada, arrive à point nommé alors qu'il ne reste que quelques mois pour préparer les festivités du 125e anniversaire de fondation du Local 144 qui se tiendront au cours de l'année 2023. Mais pour l'heure, cette construction qui ne rend pas peu fier son instigateur, dont la volonté d'optimiser la qualité du bâtiment aura teinté dans son intégrité la réalisation, se distingue en tant que bâtiment très performant sur les plans environnemental et énergétique.

« Je voulais quelque chose de différent, mais surtout, mon désir était d'obtenir une bâtisse de qualité, durable et confortable », explique Sylvain Morissette, gérant d'affaires et secrétaire financier à l’Association Unie — Local 144. « Pour ce faire, avec la collaboration de l'équipe de conception, nous avons redéfini ce qui est possible en matière de durabilité, en intégrant toute une gamme de technologies de pointe respectueuses de l'environnement qui permettent qu'un projet comme celui du Local 144 devienne une réalité et qu'il puisse atteindre le niveau rigoureux de la certification LEED Platine. » Et c'est dans cet esprit qu'il a maintenu la décision de greffer un centre de formation de haut niveau aux bureaux administratifs.

« Au premier chef, il s'agit d'une transposition d'un programme qui était souhaité par le client afin de créer un tout chaleureux, lumineux, bref un lieu de rassemblement où il ferait bon travailler », fait remarquer l’architecte du projet, Alexandre Blouin, de Blouin Tardif architectes. Puis s'ensuit cette conception sans nulle autre pareille qui se démarque par ses deux programmes distincts.

D'une part, le bâtiment administratif s'organise autour d’un atrium de bois surmonté d'un imposant lanterneau, espace référence d'articulation et de conception architecturale constituant un lieu privilégié de communication et de convivialité pour les membres du syndicat. D'autre part, relié par une passerelle, un centre de formation continue doté d'une structure d'acier traditionnelle qui se divise en trois grands ateliers fonctionnels et polyvalents avec classes et une salle mécanique pouvant être visitée et qui sert à la formation.

Pour bien marquer le caractère différent des deux parties de cet ensemble, l'enveloppe du bâtiment administratif se distingue par sa maçonnerie d'argile tandis que le centre de formation affirme son caractère industriel avec son extérieur en panneaux de revêtement métallique.

Vitrine de savoir-faire

« Ce double bâtiment ayant pignon sur rue dans le parc industriel Pointe-aux-Trembles est bien plus qu'un siège social ou un centre de formation : c'est un démonstrateur de savoir-faire », enchaine Martin Roy, ingénieur, LEED Fellow, président de Martin Roy et Associés, ayant participé au projet en tant qu'ingénieur mécanique/électrique. « C'était une demande du client que de bien mettre en évidence les installations électromécaniques. D'ailleurs, on peut facilement suivre la tuyauterie dans le bâtiment quand on entre par la salle mécanique, qui elle aussi est visible à travers une grande baie vitrée. En fait, la salle mécanique est un outil de formation en soi. Tout est apparent, notamment les systèmes de récupération d'eau et les thermopompes, et tout est agencé pour que l'on puisse bien comprendre le fonctionnement des systèmes mécaniques, plus particulièrement les systèmes de plomberie. »

Une panoplie d'éléments de conception durable et d'ingénierie contribuent à l'efficacité énergétique de ce bâtiment qui prêche par l'exemple par les solutions novatrices qu'il propose. « Quand on fait le décompte de toutes les mesures mises en place dans ce bâtiment, il est facile de comprendre pourquoi celui-ci s'est vu décerner le sceau d'exception LEED Platine », souligne Lianne Cockerton, ingénieure, chargée de projet en mécanique du bâtiment et associée chez Martin Roy et Associés.

« Pour ne nommer que celles-ci, mentionnons un système de récupération d'eau de pluie, l'intégration d'une multitude de panneaux photovoltaïques — en fait, il s'agit de l'un des bâtiments ayant la plus grande quantité de panneaux voltaïques au Québec —, de la géothermie, de l'aérothermie, une enveloppe performante, un système de chauffage par radiation, de la ventilation naturelle, de l'éclairage naturel, de la ventilation par déplacement, et la liste pourrait s'allonger encore et encore. Quand on plonge dans les détails, on comprend que l'équipe de conception et le client ont repoussé les limites de ce qui peut être inclus dans une construction de type industriel. »

Martin Roy est bien d'accord : « Il s'agit probablement du centre le plus adéquat à la formation des tuyauteurs et soudeurs de tuyauterie au pays, et certainement le seul certifié LEED Platine au Canada. Local 144 est l'un des syndicats les plus dynamiques au Québec et, qui plus est, il représente le plus grand pourcentage de gens du métier. Il faut savoir que la plupart des syndicats ne font pas la formation de leurs membres. Notre client a donc décidé de construire son propre centre de formation plutôt que d'utiliser des installations qui se trouvent dans les cégeps et qui sont moins bien adaptées. »

Confort et innovation

Le confort des occupants est sans contredit la marque de commerce du Local 144. Tout a été pensé pour que les membres s'y sentent bien. À l'intérieur, même s'il s'agit en fait de deux bâtiments au caractère distinct, tous peuvent profiter des effets de l'éclairage zénithal au cœur de la structure du centre administratif, de l'espace généreux et accueillant, de la chaleur du bois de la structure apparente. Et le deuxième pavillon ne se trouve pas en reste non plus avec la présence d'éclairage naturel pénétrant de larges pans d'isolant translucide positionnés sur le mur sud du centre de formation, ses espaces adaptables pour l'enseignement théorique et ses vues en plongée sur l'un des ateliers et sur la salle mécanique.

« Au-delà de l'idée qu'un bâtiment durable se définit principalement par sa consommation énergétique faible, il doit y avoir d'abord un bâtiment agréable et confortable pour ses occupants, indique Martin Roy. Cela implique la qualité de l'air intérieur, le confort acoustique, le confort lumineux... C'est aussi un bâtiment qui, par ses différentes composantes, va limiter son impact sur l'environnement. 

« Il n'est pas rare d'associer bâtiment durable et innovations, ajoute-t-il. Cependant, les innovations sont apparues au début du mouvement du bâtiment durable, alors qu'à ce jour, je dirais que nous en sommes plus à utiliser plusieurs innovations de concert. Voilà ce qui rend le Local 144 fort intéressant! Par exemple, l'utilisation de planchers radiants couplés à la géothermie et à l'aérothermie fait en sorte que ce bâtiment bénéficie d'une très grande réduction de sa consommation d'énergie. 

« De même, poursuit Martin Roy, la récupération de la chaleur provenant de la ventilation sur l'évacuation des hottes de captation pour la soudure est une pratique qui demeure encore trop rare. Autre exemple, l'ajout de murs translucides, plutôt que de la fenestration, permet d'optimiser la quantité de lumière naturelle dans le lieu de travail sans compromettre l'efficacité sur le plan de la résistance thermique qui équivaut approximativement à celle d'un mur opaque. »

Afin de créer un lieu invitant pour que les occupants puissent profiter de l'extérieur, des espaces conviviaux ont aussi été aménagés, en retrait de la circulation et à l'abri du soleil et du vent. Des arbres fruitiers agrémentent le site et un mobilier intégré invite les gens à s'y reposer. Une véritable oasis dans une mer d'asphalte environnante.

Tout cela n'est pas le fruit du hasard, mais reflète la volonté du client d'offrir à ses membres un endroit chaleureux, lumineux, où il fait bon travailler et se rassembler. Bref, un lieu où tous sont bien représentés, de sorte qu'ils se sentent comme à la maison.

« Ce projet est le résultat d'une collaboration exceptionnelle de la part de tous les intervenants, indique Alexandre Blouin. Autant le plombier que le responsable de l'HVAC, l'électricien, bref, tout le monde était soucieux de la qualité de la réalisation et surtout de la coordination sur place. La conception intégrée a vraiment été un élément important tout au long du projet, mais je dirais que la réalisation intégrée a été ce qui a fait la différence à la fin. Rarement voit-on cela sur un chantier, particulièrement dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre et de coûts galopants ! »

Modèle d’ingéniosité

La concrétisation d'un tel ensemble est loin d'être une tâche facile, d'autant plus qu'en aucune occasion il ne fallait perdre de vue la dimension durable. La rencontre de défis lors de la réalisation d'un bâtiment de cette teneur est toutefois inévitable. Pour ne nommer que ceux-ci : l'intégration de la structure de bois, le béton des éléments structuraux, le bloc central sur lequel l'escalier se déploie, mais, précise l'architecte chez Blouin Tardif, le plus gros défi provenait de la toiture puisque celle-ci est tapissée de panneaux photovoltaïques qu'il fallait bien orienter et bien intégrer.

« Nous étions en présence d'une immense toiture industrielle qui était percée autant de fois qu'il y avait d'attaches des structures d'aluminium pour soutenir ces panneaux, souligne-t-il. Cela revient à dire qu'il y avait mille trous dans la toiture! Nous avons donc travaillé de concert avec l'Association des Maîtres Couvreurs du Québec pour exécuter correctement les travaux. »

Trouver des solutions innovantes, savoir parfois sortir des sentiers battus afin d'offrir des alternatives créatives et multiplier les initiatives innovantes auront permis qu'un projet d'envergure comme celui du Local 144 puisse devenir réalité. Pour tous les intervenants au projet, il est indéniable que le succès de cette réalisation est le fruit de la mise en commun de toutes les expertises réunies autour de la table. Cependant, tous saluent l'audace et la capacité d'investissement du donneur d'ouvrage, Sylvain Morissette, acteur-clé sans lequel le projet du Local 144 n'aurait pas reflété le même panache.

Et de conclure celui-ci : « Au regard des multiples enjeux qui nous auront mis au défi, l'une des plus grandes responsabilités pour le futur sera de maintenir le Local 144 en santé selon les résolutions écoresponsables que nous avons prises afin d'offrir toujours le meilleur. Et nous y comptons bien ! »