Louis-Philip Bolduc, ing., PA LEED BD+C, directeur – Conception chez A+, livre ses réflexions sur l’après COVID-19. Premier de trois articles.
J’ai un peu hésité avant d’embarquer dans ce projet d’articles sur l’importance du moment que nous vivons et sur l’après COVID-19. En ces temps de confinement, nous sommes nombreux à mettre par écrit nos réflexions sur cette crise. L’environnement et les sujets liés au bâtiment n’y font pas exception, et déjà plusieurs se sont questionnés sur ce qu’il adviendra dans ce secteur.
Alors pourquoi avoir décidé à mon tour de suivre cette tendance et d’ajouter des articles de plus dans cet océan d’informations qui nous submerge?
Je ne prétends vraiment pas détenir la vérité, loin de là, mais après avoir autant lu et depuis toutes ces années où je m’implique à faire avancer la notion de bâtiment durable, je dois admettre que je suis inquiet. Je crois qu’il existe un risque réel de recul pour la transition écologique en cours si nous ne sommes pas en mesure de nous adapter à la sortie de cette crise.
La bonne nouvelle, c’est que plus que jamais il existe un savoir-faire et une communauté capable d’exercer un leadership afin d’éviter que mes inquiétudes se concrétisent. Je souhaite ainsi sensibiliser mes pairs avec mes articles. D’abord en lançant une mise en garde vis-à-vis le risque réel de recul et, au final, en invitant à exercer un leadership commun pour qu’ensemble le risque se transforme en une occasion réelle d’avancée.
Alors pourquoi m’en faire autant, au point même d’en venir à vous écrire? La raison est simple. N’oubliez pas qu’en tant de crise, l’instinct de survie prend le dessus. Cet instinct a malheureusement tendance à mettre de côté ce qui ne nous semble pas essentiel…
De nombreux spécialistes ont été consultés par les médias et, à ce jour, plusieurs craignent que les gouvernements, au nom de la relance économique, relèguent les enjeux climatiques à l’arrière-plan. N’oublions pas que la relance économique à la suite de la crise de 2008 a provoqué une hausse de 5 % des émissions de CO2 sur les deux années suivantes… La crise impacte déjà les négociations climatiques pourtant primordiales afin d’atteindre les objectifs de l’accord de Paris, et vient de provoquer le report à 2021 de la COP26.
Les paliers gouvernementaux demeurent les locomotives qui influencent notre société. Soyons conscients que cette crise entrera en compétition avec le dossier environnemental. Certains groupes se sont néanmoins levés et au moment de vous écrire, un groupe de 15 organismes a d’ailleurs publié une lettre demandant une reprise sur fond vert.
Il s’agit d’un signe encourageant, mais n’oublions pas non plus les traumatismes collectifs qui risquent de nous impacter. Une récente chronique questionnait avec pertinence la quantité de personnes qui voudront de nouveau s’entasser dans les transports collectifs après ce moment de distanciation sociale. Quand on connait l’impact du transport sur les émissions carbones, il importe de demeurer à l’affût de ces comportements.
Ne tenons rien pour acquis, et comme Churchill l’a si bien dit : « Il ne faut jamais gaspiller une bonne crise. » Il serait simpliste d’attendre la fin de celle-ci pour reprendre nos activités comme avant son arrivée. Nous devons déjà préparer la suite et surtout nous mettre prêts à défendre l’importance de la transition écologique.
*L’auteur est président sortant du conseil d’administration du Conseil du bâtiment durable du Canada – Québec et président du conseil d’administration d’Écohabitation