Verdir sa gestion immobilière en continu
Verdir ses pratiques de gestion immobilière exige un effort soutenu. Maintenir le cap, tout autant.
Par Marie-Ève Sirois
Si tous s’entendent sur les vertus d’une exploitation immobilière environnementale, il reste que les taux locatifs doivent demeurer compétitifs. Là est l’un des plus grands combats que doivent mener les propriétaires et gestionnaires d’immeubles qui aspirent à alléger l’empreinte écologique de leur parc immobilier.
Dans ce contexte, comment en sont-ils arrivés à augmenter significativement le niveau de performance de leurs bâtiments ces dernières années ? D’abord, il faut dire que les façons de faire dans l’industrie ont graduellement changé, notamment grâce à la venue de BOMA BESt. « Avant, c’était systématique, on jetait les rebuts de construction lors des rénovations. Le coût était même plus élevé si on les récupérait », observe Steve Poulin, directeur immobilier à la Société québécoise des infrastructures.
« Mais, heureusement, ce n’est plus nécessairement le cas de nos jours, poursuit-il. La conscientisation et les connaissances nous poussent à trouver des moyens de récupérer et de recycler des matériaux et des équipements, voire de les réutiliser quand cela est possible, et le marché s’est développé en ce sens. »
Activités de sensibilisation
Ainsi, tant les gestionnaires immobiliers que les occupants se sont éveillés à l’importance d’adopter des pratiques plus durables. « On voit maintenant des activités de sensibilisation organisées conjointement entre les entreprises en développement durable et les propriétaires, amène en exemple Steve Poulin. De plus, grâce au cadre d’évaluation des certifications, l’entretien des immeubles est souvent mieux planifié et plusieurs pratiques de gestion sont systématisées. »
Et d’enchaîner Pierre Boudrias, directeur immobilier principal, services immobiliers chez Bentall Kennedy : « Nous offrons désormais des séminaires en gestion de l’énergie et nous suscitons des occasions de rencontre entre les équipes d’intervention, de manière à inciter le réflexe d’économie des ressources. En ce sens, BOMA a permis d’élever les standards. »
Pratiques innovatrices
Cette volonté de mieux performer sur le plan environnemental a aussi amené des façons de faire nouvelles, parfois innovatrices. Dans certaines organisations, par exemple, le personnel d’entretien ménager est muni d’autocollants préimprimés avec des conseils de base, tel celui de fermer son ordinateur en fin de journée.
Ainsi, lorsqu’un appareil est resté ouvert après le départ d’un employé, un autocollant est apposé sur le bureau du fautif, qui est rapidement et amicalement rappelé à l’ordre. À même le mémo, on évoque également que l’édifice fait l’objet d’une démarche BOMA BESt et qu’il appartient à tous de satisfaire les critères de performance. Simple, original, peu coûteux et efficace !
D’autres ont choisi de jeter des bases solides au sein de leur organisation. C’est le cas d’Annik Desmarteau, directrice du Centre CDP Capital pour Ivanhoé Cambridge, pour qui chacun a un rôle à jouer. Car l’exploitation environnementale d’un immeuble n’est pas que l’affaire d’un comité ou d’un point à l’ordre du jour.
Celle qui est aussi présidente du comité Communications de BOMA Québec explique : « Tout passe par le travail d’équipe. L’adoption de pratiques durables est intégrée dans tous les processus, elle fait partie de toutes nos réunions. Nous tenons compte de l’impact environnemental du bâtiment dans nos décisions, nos contrats et nos achats. Nos gestes quotidiens sont imprégnés de cette démarche. »
Stratégie évolutive
Pour Steve Poulin, la base d’une saine gestion commence avec une bonne connaissance de son immeuble. Et la première question à se poser est la suivante : « Comment puis-je m’améliorer si je ne connais pas mon point de départ ? » BOMA BESt, selon lui, devient alors l’outil idéal pour définir l’état initial des lieux, puis une stratégie évolutive. De fait, la théorie des petits pas a su séduire les gestionnaires qui préfèrent les échelons aux lourds et coûteux changements radicaux.
Reste pourtant que le travail d’encadrement, de structuration et de surintendance n’est jamais vain. Il y a le facteur humain aussi. En ce sens, la démarche de certification témoigne d’une certaine maturité organisationnelle puisqu’elle force l’engagement à systématiser les bonnes pratiques. « La certification et la recertification, note Pierre Boudrias, c’est le meilleur moyen de valider si le processus établi est adéquat. » Avec la vérification effectuée par une tierce partie, on se prémunit donc contre le nivèlement par le bas.
Objectifs de performance
Plusieurs font le choix d’utiliser les objectifs de performance comme un critère d’évaluation de rendement. « Chez nous, affirme Annik Desmarteau, le rendement des employés est fonction de la bonne application de certaines mesures environnementales. » Et c’est ainsi qu’elle réussit à augmenter son apport de matières putrescibles au compost, année après année.
On sait que l’approche de plusieurs gestionnaires est proactive plutôt que réactive. Pour la rentabilité de l’investissement, on mise sur les économies d’énergie et on tente de faire le maximum sur tous les plans avec ces gains. Et si éventuellement les volumes d’eau potable épargnés ou la diminution des effluents vers les infrastructures municipales rapportent directement aux propriétaires, alors ils seront les premiers à en bénéficier. Reste que selon les spécialistes du domaine interrogés, l’image des bâtiments gérés de manière optimale est grandement rehaussée et facilement perceptible pour les usagers aguerris.
Efficacité énergétique
- Préconiser l’installation de variateurs de vitesse sur les pompes à chaleur
- Remplacer les chaudières inefficaces
- Installer des récupérateurs de chaleur sur l’air vicié
- Acquérir des équipements de récupération d’eau
- Optimiser la captation de la lumière naturelle
Gestion de l’énergie
- Installer des sous-compteurs
- Adopter des pratiques de mise en service périodique
Transport
- Offrir aux occupants des locaux pour se changer et des douches
Eau
- Installer des urinoirs et des toilettes à faible débit
- Éliminer les unités de refroidissement à circuit ouvert
- Mettre en place des sous-compteurs pour les tours de refroidissement par évaporation
Réduction des déchets
- Caractériser le profil de génération de déchets des occupants de l’immeuble
- Effectuer des vérifications périodiques pour valider les paramètres en place
- Détourner une portion des déchets en procédant au compostage des matières organiques
Site
- Sélectionner des mesures qui permettent d’atténuer l’effet d’îlot de chaleur urbain
- Limiter les morts d’oiseaux
Émissions
- Installer des chaudières à faibles émissions de NOx
- Mettre en place des détecteurs de fuite de frigorigène et des systèmes de récupération de ce fluide
Effluents
- Opter pour des mesures de gestion des eaux pluviales
Environnements intérieurs
- Augmenter l’apport de lumière naturelle à l’intérieur du bâtiment
- Veiller à ce que les niveaux de ventilation soient adéquats par rapport au taux d’occupation de l’immeuble
Système de gestion environnementale
- Effectuer un sondage sur le niveau de satisfaction des occupants
- Inclure des clauses écologiques dans les baux
- Définir des objectifs environnementaux partagés entre le propriétaire et le locataire