Par Marie-Ève Sirois
Le biomimétisme invite les concepteurs de bâtiment à s’inspirer de la nature. Et à réduire l’utilisation des matériaux et de l’énergie.
Né de la volonté d’impliquer les biologistes dans les processus de conception industrielle, le biomimétisme est une discipline qui gagne en popularité depuis environ une quinzaine d’années. Plusieurs ouvrages ont depuis été publiés sur le sujet, dont l’un des plus récents s’intitule The Shark’s Paintbrush,
Pour son auteur, Jay Harman, le biomimétisme consiste à créer en s’inspirant de la nature. « Aujourd’hui, avance-t-il en entrevue avec Voir vert, nous avons toutes les connaissances, équipements et instruments requis pour étudier en détail les phénomènes naturels, que ce soit à l’échelle macroscopique ou microscopique. Qui plus est, le monde du vivant optimise ses systèmes depuis des millions d’années, toujours dans l’optique d’utiliser le moins de matériaux et le moins d’énergie possible. »
Selon lui, l’homme a tout avantage à imiter les ingénieuses lois de la nature ! Elle est propre, verte et durable. « En suivant les principes biologiques, dit-il, il est possible d’atteindre une plus grande richesse et une viabilité économique. Parce que les plantes, animaux et phénomènes naturels s’adonnent à la loi du moindre effort et qu’ils sont efficients. »
Potentiel énorme
La chimie verte est un bon exemple de biomimétisme, elle qui consiste à développer des biomatériaux à partir de molécules que l’on retrouve à l’état naturel, avec des méthodes de synthèse propres. À leur retour dans un environnement naturel, les impacts de ces molécules sont moins néfastes que ceux des composés purement synthétiques. Et comme la plupart des matériaux de construction sont basés sur une chimie quelconque, le potentiel est énorme dans le domaine du bâtiment.
Chez les fournisseurs, on peut penser aux tuiles de tapis sans colle développées par Interface, lesquelles sont conçues de manière à imiter les principes d’adhérence du gecko. Sto Corp a pour sa part développé une peinture autonettoyante, un mélange hydrophobique qui empêchent l’eau et les saletés de coller à la surface recouverte.
Pour la firme d’architecture HOK, c’est toute une équipe spécialisée dans le biomimétisme qui s’attèle à la tâche lorsqu’un nouveau projet doit être défini. Structure, systèmes et matériaux sont choisis avec l’approche biomimétique. Dans l’un de leurs concepts, un gratte-ciel situé en Corée du Sud, les concepteurs ont opté pour une ossature en forme de nid d’abeille : une structure stable qui nécessite peu de matériau.
Jay Harman donne également l’exemple d’un produit développé par son entreprise spécialisée en mécanique des fluides, PAX Scientific, soit une variété de déclinaisons d’hélices servant à divers équipements mécaniques, notamment des ventilateurs et des pompes. L’efficacité de ces derniers est de 30 à 50 % supérieure à celle d’hélices typiques. Le secret : une forme semblable à celle d’un vortex d’écoulement ou encore à un nautile. En mathématique, cette forme universelle spiralée, très présente dans la nature, s’exprime à l’aide du ratio d’or (1 :1.618) ou encore de la suite de Fibonacci.
Aux yeux de Jay Harman, il est temps de changer notre approche industrielle. D’autant plus que l’on sait maintenant comment s’inspirer de la nature pour créer autrement.