Aller au contenu principal
x

La métamorphose de l’Insectarium : quand nature et architecture ne font qu’un

29 juin 2022

Devenue à l’étroit dans ses locaux, l’Insectarium de Montréal a profité de ses plans d’agrandissement pour moderniser son concept muséal avec un objectif bien précis : proposer une expérience immersive hors de l’ordinaire à ses visiteurs.

Lorsqu’Espace pour la vie a lancé le concours d’architecture international pour la métamorphose de l’Insectarium en 2014, ses équipes avaient déjà longuement réfléchi à l’approche souhaitée pour mettre en valeur leur mission et leur collection. Le consortium Kuehn Malvezzi, Pelletier de Fontenay, Jodoin Lamarre Pratte architectes, lauréat du concours, a su répondre à leurs attentes.

Le résultat ? Un espace d’environ 3600 m2 caractérisé par deux volumes distinctifs qui se fondent dans le paysage du Jardin botanique environnant et font corps avec leur sujet : une serre immersive baignée de lumière naturelle et un dôme accessible par une série de tunnels et de grottes.

Une réinitialisation sensorielle

« Franchir la porte de l’Insectarium, c’est traverser un point de bascule », peut-on lire dans le programme du concours architectural. « Après ce point on vit l’échelle, le temps, les rythmes des insectes. » Répondant à ces attentes, le parcours immersif proposé par les concepteurs débute avant même de pénétrer dans le bâtiment. Dès son arrivée sur le site, le visiteur est amené à traverser un jardin pollinisateur pour atteindre l’entrée du musée située légèrement en contrebas. « Le parvis est devenu pour nous le début de la fourmilière », explique Yves de Fontenay, architecte concepteur chez Pelletier de Fontenay. « En commençant ici, il y a déjà une perte de repère, surtout dans l’horizon autrement très plat du Jardin botanique. »

Il va sans dire que le design biophilique occupe une place importante dans le concept architectural de la métamorphose de l’Insectarium. L’implantation du musée au cœur du Jardin botanique offre d’emblée une proximité avec la nature, particulièrement dans la grande serre.  Cet espace permet d’être enveloppé à la fois par les grands arbres de l’extérieur et par la végétation à l’intérieur de la serre, le tout en côtoyant des insectes dans une proximité parfois surprenante. La présence de l’eau et la lumière en constante mouvance, directement influencée par les conditions météorologiques, contribuent également à lier le visiteur aux éléments naturels dans la serre.

La grande serre permet d’être enveloppé par la végétation extérieure et  intérieure. Crédit : James Brittain

Les visiteurs ne sont pas seuls à bénéficier des bienfaits de la biophilie. Comme l’explique Joannie Quirion, architecte chez Jodoin Lamarre Pratte architectes et responsable du volet LEED du projet en architecture, « on parle beaucoup de l’expérience visiteur, mais tout le projet est organisé de telle sorte que même les employés ont un lien très direct avec la nature. » En effet, les espaces de travail bénéficient en grande majorité d’un contact avec l’extérieur.

Le design met également à profit les analogies naturelles et l’organisation spatiale pour transporter les visiteurs au pays des fourmis. En effet, ceux-ci sont invités à déambuler dans de sinueux couloirs souterrains rappelant une fourmilière, où des grottes proposent des expériences sensorielles permettent de voir, d'entendre et de ressentir les vibrations comme des insectes. « Le mystère ressenti dans le parcours est renforcé par la découverte progressive des différents lieux, par l’attrait de l’espace suivant », souligne Joannie Quirion.

Les visiteurs sont invités à déambuler dans de sinueux couloirs souterrains rappelant une fourmilière. Crédit : James Brittain

Cette incursion souterraine dans l’univers des insectes culmine avec la rencontre d’un imposant dôme de 10 mètres de haut regroupant la collection naturalisée de l’Insectarium.

Les défis de reproduire la nature

Si l’expérience est aussi réussie, c’est qu’il y croit. Reproduire si justement un milieu naturel n’est toutefois pas une tâche aisée. Marc-Antoine Bourbeau, architecte chez Jodoin Lamarre Pratte architectes et surveillant sur le chantier de l’Insectarium, explique quelques-uns des défis rencontrés. « Initialement la terre de pisé devait être utilisée, mais certaines contraintes de réalisation, notamment au point de vue de la main-d’œuvre et du savoir-faire local, nous ont amenés à nous tourner vers le béton projeté. » Les parois qui représentent si justement une fourmilière sont donc constituées d’une structure en armature, sur laquelle un treillis métallique a été attaché afin de recevoir le béton. Difficile toutefois de donner des indications précises du fini recherché sur plan; la bonne communication sur le chantier a donc été primordiale. « Nous avons fait plusieurs tests afin d’atteindre la couleur recherchée, de reproduire le plus justement possible la forme des alvéoles… Après, il s’agit d’un travail très artisanal de projection du béton et de lissage à la truelle de certaines surfaces. » La construction du dôme d’une hauteur de 10 mètres a également nécessité une attention particulière tant du côté de sa structure et de ses fondations que du renvoi acoustique, minimisé par l’installation de tapis et de mobilier assurant l’aspect feutré du lieu.

Dans l’antre de l’Insectarium

Derrière la magie de l’Insectarium se cache une mécanique impressionnante permettant de régulariser les espaces, particulièrement ceux habités de la grande serre. Stratégiquement implantée sur le site, celle-ci profite de la chaleur du soleil en hiver et du couvert des mélèzes extérieurs en été; toutefois, son entretien quotidien demeure complexe et demande une constante attention. Une station météorologique est d’ailleurs aménagée sur le site afin de pouvoir prévoir la multitude d’ajustements nécessaires selon la température extérieure : ouvertures et toiles, système de géothermie, brumisateurs, etc. Comme l’explique Laurent Laframboise, ingénieur-concepteur en électromécanique chez Dupras-Ledoux et responsable de cet aspect du projet, « c’est un travail complexe qui demandera une pleine année de mise en service pour s’ajuster et profiter pleinement de tous les contrôles thermiques mis en place ».

 

Caractéristiques durables du projet

Porté dès sa conception par de hauts standards environnementaux, le projet de métamorphose de l’Insectarium vise une certification LEED Or.  Parmi les mesures durables mises en place :

  • Orientation des bâtiments vers le sud
  • Puits géothermiques
  • Roue thermique et ventilation à vitesse variable avec détection de CO2
  • Éclairage DEL
  • Lumière naturelle et vues sur le paysage environnant
  • Utilisation de 18 % de matériaux avec contenu recyclés, 48 % de matériaux régionaux et 92 % de bois certifié FSC
  • Gestion des eaux pluviales
  • Conservation des arbres
Équipe de projet
  • Architecture : Kuehn Malvezzi / Pelletier de Fontenay / Jodoin Lamarre Pratte architectes en consortium
  • Architectes concepteurs et muséologie : Kuehn Malvezzi
  • Architectes concepteurs : Pelletier de Fontenay
  • Architectes concepteurs et gestion du chantier : Jodoin Lamarre Pratte architectes
  • Architecture du paysage : Atelier Le Balto
  • Ingénieurs électromécaniques : Dupras Ledoux
  • Ingénieurs en structure : NCK
  • Ingénieurs civils : Génie+
  • Accompagnateur développement durable (certification LEED) : CIMA+
  • Signalisation intérieure et extérieure : Kuehn Malvezzi avec Double Standards
  • Exécution et surveillance de chantier pour la muséologie : La bande à Paul