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Créer des milieux de travail axés sur les activités

12 juin 2023
Par François Cantin, M. Sc. Arch.*

Bâtiment durable Québec CHRONIQUE DE BÂTIMENT DURABLE QUÉBEC
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Transformation des milieux de travail : regard sur la productivité et le bien-être perçus

Les milieux de travail axés sur les activités (MTAA[1]) gagnent en popularité, autant dans le secteur privé que dans la fonction publique québécoise et fédérale. Cette popularité repose en grande partie sur l’hypothèse selon laquelle les MTAA ont le potentiel d’améliorer la productivité tout en favorisant la satisfaction du personnel qui les occupe. Pour atteindre ces objectifs, un aménagement (ou réaménagement) MTAA doit être envisagé comme un projet d’organisation, c’est-à-dire planifié en considérant l’organisation du travail des équipes ainsi qu’en intégrant des technologies et en concevant des espaces adaptés aux tâches à réaliser. Bref, il ne s’agit pas d’une mince affaire!

MTAA et productivité perçue

Au cours des dernières années, des recherches ont été menées afin de documenter l’impact des MTAA sur la productivité de leurs occupants. Alors que certains travaux ont permis d’observer une augmentation de la productivité perçue dans un MTAA en comparaison avec des environnements de type open space (Foley et al. 2016[2], Blok et al. 2006[3], van der Voordt 2004[4]), d’autres n’ont pas dénoté d’impact significatif sur la productivité perçue (Arundell et al. 2018[5], Meijer et al. 2009[6]). Dans quelques cas, une baisse de la productivité perçue par les occupants d’un MTAA qui avaient au préalable accès à des bureaux fermés assignés a même été observée (van der Voordt 2004[4]).

Certes, à la lumière de ces conclusions diversifiées, pour ne pas dire mitigées, il pourrait être tentant de remettre en question la plus-value des MTAA. Il importe toutefois de rappeler que la diversité des méthodologies utilisées pour conduire les recherches ainsi que la variété des environnements à l’étude en termes de configuration spatiale et de capacité à soutenir les occupants dans leurs tâches constituent des variables ayant un impact direct sur les résultats obtenus.

Paramètres à considérer pour optimiser un MTAA

Le niveau de performance et d’appréciation des MTAA étant variable, des chercheurs ont donc travaillé à déterminer les aspects d’un projet ayant le plus d’impact sur la productivité et le bien-être.

À ce sujet, mentionnons les travaux de Haapakangas et al. (2018)[7] qui ont démontré que les niveaux de productivité et de bien-être perçus par les occupants étaient principalement influencés par la qualité des environnements physiques offerts, la capacité des espaces à procurer de la confidentialité tout en favorisant la communication. En complément, ajoutons que l’augmentation de la fréquence des déplacements en cours de journée (workspace switching), liée à une utilisation davantage active du milieu de travail afin de s’offrir des conditions optimales pour la réalisation d’une tâche donnée, est généralement associée à une productivité perçue supérieure par les occupants. Proposer une variété d’espaces complémentaires semble donc avantageux.

À l’opposé, une augmentation du temps passé à chercher un point de travail approprié à la tâche du moment est souvent associée à une productivité et à un bien-être perçus inférieurs. Il apparaît ainsi primordial que la répartition et la configuration des espaces soient réfléchies de manière à assurer des transitions rapides et en douceur. En ce sens, l’intégration d’un système centralisé de réservation permettant de localiser les points de travail libres pourra s’avérer pertinente pour les projets d’une certaine envergure.

En terminant, toujours selon Haapakangas et al. (2018)[7], l’impossibilité de personnalisation, la réduction des aires de rangement et les enjeux inhérents à l’entretien ménager associés aux milieux de travail non assignés, bien qu’ils puissent être des sources d’insatisfaction, ont généralement un impact moindre sur les niveaux de productivité et de bien-être perçus en comparaison avec les critères de confidentialité et de communication précédemment mentionnés.


* L’auteur est associé, directeur avant-garde et chargé de projet chez Coarchitecture, spécialiste des stratégies d’occupation et du confort de l’occupant au sein des environnements de travail, formateur à la Faculté des sciences et de génie de l’Université Laval et pour Formations Infopresse, ainsi que bénévole pour Bâtiment durable Québec (BDQ).


1. Le MTAA vise à fournir au personnel les meilleures circonstances pour réaliser chacune de ses activités liées au travail sans distinction de statut ou niveau hiérarchique. Tirant profit d’un mode de travail mobile et numérique affranchi des points de travail assignés, le MTAA permet à ses utilisateurs de choisir le cadre de travail qui convient le mieux à leurs activités et préférences.

2. Foley, B., et al. (2016) Sedentary behavior and musculoskeletal discomfort are reduced when office workers trial an activity-based work environment. Journal of Occupational and Environmental Medicine, Vol. 58, No 9, p. 924-931.

3. Blok, M., et al. (2009) The Effects of a Task Facilitating Working Environment on Office Space Use, Communication, Concentration, Collaboration, Privacy and Distraction. The 17th World Congress on Ergonomics (IEA 2009), 9-14 August 2009. International Ergonomics Association, Beijing, China.

4. van der Voordt, T.J.M. (2004) Productivity and employee satisfaction in flexible workplaces, Journal of Corporate Real Estate, Vol. 6, No 2, p. 133-148.

5. Arundell, L. et al. (2018) The impact of activity-based working (ABW) on workplace activity, eating behaviours, productivity, and satisfaction. International Journal of Environmental Research and Public Health, Vol. 15, No 5, 16 p.

6. Meijer, E.M. et al. (2009) Effects of office innovation on office workers’ health and performance. Ergonomics, Vol. 52, No 9, p. 1027-1038.

7. Haapakangas, A. et al. (2018) Self-rated productivity and employee well-being in activity-based offices: The role of environmental perceptions and workspace use, Building and Environment, Vol. 145, November 2018, p. 115-124.