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7 avril 2011
Par Marie Gagnon

Un modèle de reconversion durable : la Place Telus, dans le secteur du Vieux-Port de Québec.

Novembre 2008. La Société du 300 Saint-Paul, qui réunit le Fonds de solidarité FTQ et le Groupe de Bertin, entreprend la revitalisation d’un ancien centre de tri de Postes Canada, dans le secteur du Vieux-Port de Québec. Les travaux font suite à un appel d’offres de Telus, qui cherche à rassembler sous un même toit ses effectifs de la Vieille-Capitale. Le bâtiment doit répondre à des exigences précises : se trouver à proximité des centres de décision et être frappé du sceau LEED.

Cette volonté de Telus n’a rien de nouveau. « Depuis cinq ans, nous avons beaucoup réduit l’incidence de nos activités sur l’environnement, mentionne Amélie Cliche, porte-parole de l’entreprise. Nous avons mis sur pied des programmes de télétravail et développé un système de conférence à distance pour limiter les déplacements. Ces préoccupations s’étendent également à la gestion de nos immeubles. »

Or, le centre de tri situé au 300 de la rue Saint-Paul à Québec est un immeuble industriel désaffecté. Désuet, il trône au milieu d’un site fortement contaminé aux hydrocarbures. L’édifice, qui deviendra plus tard la Place Telus, présente toutefois des avantages certains. Il se trouve à distance de marche de la Gare du Palais, du port et des commodités offertes par les quartiers Petit-Champlain et Saint-Roch.

Outre sa localisation enviable, le bâtiment construit en 1950 se distingue par la pureté de son architecture et son revêtement de travertin. Il offre aussi beaucoup d’espace, ses six étages hors sol totalisant pas moins de 160 000 pieds carrés. Conscients de la valeur de l’édifice, les promoteurs l’acquièrent et le proposent à Telus.

Aussitôt l’affaire conclue, ils entreprennent sa reconversion. Une démarche visant l’obtention de la certification LEED-CS (Core and Shell), par le propriétaire, et de la certification LEED-CI (Commercial interiors), par Telus qui en loue trois étages, soit 55 000 pieds carrés. Les cibles à atteindre : l’Or d’une part, l’Argent de l’autre.

Les interventions menées par le propriétaire visent essentiellement la décontamination du site, la mise aux normes du bâtiment et l’optimisation de son efficacité énergétique. « Nous avons travaillé autant que possible dans le respect du bâti, mentionne François Moreau, architecte associé au bureau de Québec de la firme ABCP Architecture. On a quand même été obligés de jouer dans la structure pour agrandir les fenêtres afin d’accroître l’apport en lumière naturelle et ainsi améliorer le bilan énergétique global du bâtiment. »

La structure particulière des étages, d’une hauteur de 23 pieds de plancher à plancher, a toutefois servi les desseins des architectes. « Cela nous a permis d’installer un système de ventilation par déplacement, comme celui de la Caisse de dépôt et placement, illustre l’architecte québécois. Cette solution est coûteuse dans un bâtiment neuf, car elle nécessite beaucoup d’espace. Mais ici, le bâtiment s’y prêtait bien, il nous a suffi de surélever le plancher. »

Il précise que ce mode de ventilation, aussi appelé diffusion d’air par stratification, favorise non seulement l’économie d’énergie, mais également la qualité de l’air intérieur et le confort thermique des occupants. Ce système, en diffusant l’air par la partie basse de l’espace, a pour effet de déplacer les polluants vers la grille d’évacuation située au plafond. Et comme la diffusion se fait à faible vitesse, les occupants ne sont pas gênés par les courants d’air.

Des attentes dépassées

Mais là ne se limitent les mesures écologiques mises en œuvre à la Place Telus. François Moreau signale que l’enveloppe a été entièrement dégarnie de l’intérieur afin d’en rehausser l’isolation et l’étanchéité. Les résultats parlent d’eux-mêmes : « La performance énergétique du bâtiment dépasse nos prévisions d’environ 10 %, dit l’architecte, ce qui signifie que les travaux ont été bien exécutés et qu’il n’y a que peu ou pas d’infiltrations d’air. »

Ces ouvrages de modernisation, qui se sont échelonnés de novembre 2008 à juillet 2010, ont nécessité un investissement d’environ 15 millions de dollars de la part du propriétaire. De son côté, Telus injectera près de 10 millions dans l’aménagement écologique de ses bureaux, entre octobre 2009 et septembre 2010.

« Pour Telus, indique l’associé d’ABCP, nos interventions se sont concentrées à appliquer un plan d’aménagement où les postes de travail se retrouvent en périphérie et les bureaux fermés et autres espaces techniques sont situés au centre. Tous les postes de travail profitent ainsi d’une vue sur l’extérieur. » Des appareils sanitaires et de plomberie à faible consommation d’eau, des lampes à haute efficacité énergétique, contrôlées par des détecteurs de présence et de luminosité, ont bien sûr été spécifiés.

La qualité de l’air intérieur a également été prise en compte. François Moreau rapporte notamment qu’une tente, équipée d’un ventilateur à filtre HEPA, avait été aménagée pour l’ébéniste afin de limiter la dispersion des poussières. « Le jour de l’inauguration, plusieurs invités ont semblé étonnés parce qu’aucune odeur de neuf ne flottait dans les locaux, relate-t-il. La raison est simple : nous avons tout simplement utilisé des produits de finition, des scellants et des colles à faible teneur en COV. »

Équipe de projet

Propriétaire : La Société du 300 Saint-Paul
Locataire (LEED-CI) : Telus
Architecture : ABCP architecture, en collaboration avec Claude Guy architecte
Consultation LEED : ABCP architecture
Génie électromécanique : BPR
Génie structural : Laplante & Saucier
Gérance de construction : Pomerleau

Trois faits saillants
  • Réduction de la consommation énergétique de l’ordre de 45 % par rapport à un bâtiment similaire conforme aux codes et aux normes en vigueur
  • Réduction de la consommation d’eau potable de 48 %
  • Détournement de 95 % des rebuts de construction de l’enfouissement

 

Mesures durables
  • Chaudière à haute efficacité (95 %)
  • Détecteurs de présence et de luminosité
  • Sondes de CO2 (optimisation du traitement de l’air et diminution des charges de chauffage)
  • Plus de 15 % des matériaux de construction provenant de matières recyclées
  • Plus de 40 % de tous les matériaux de construction provenant de fournisseurs locaux
  • Réemploi de matériaux d’origine (ex : pierre calcaire réutilisée dans certains planchers)
  • Toilettes à double chasse (6 litres / 4,2 litres par chasse)
  • Urinoirs à débit réduit de moitié (1,9 litre par chasse)
  • Robinetterie à faible débit (1,9 litre par minute) avec arrêt automatique
  • Grandes fenêtres optimisant l’éclairage naturel
  • Toiture blanche (nouvel aménagement)
  • Ventilation par déplacement
  • Cases de stationnement pour covoiturage
  • Prises de recharge pour véhicules électriques
  • Enclos à vélos et vestiaires dotés de douches
  • Etc.

 

Mention de l’Ordre des architectes

Le projet de la Place Telus a valu à ses architectes, en janvier dernier, une mention dans la catégorie Recyclage et reconversion, attribuée en collaboration avec RECYC-Québec, lors de la 26e édition des Prix d’excellence en architecture de l’Ordre des architectes du Québec.
Pour juger de la performance de bâtiments recyclés et reconvertis, le jury a pris en considération l’application des 3RV (réduction à la source, réemploi, recyclage et valorisation) dans la gestion des résidus de construction, de rénovation et de démolition. Il a également tenu compte du réemploi des matériaux, de l’utilisation de produits à contenu recyclé et de la planification d’espaces pour les équipements de récupération des matières recyclables.